FMJ MtlMERCREDI, OCTAVE DE PÂQUES
Frère Antoine-Emmanuel
Ac 3, 1-10 ; Ps 104 ; Lc 24, 13-35
7 avril 2010
Montréal, Sanctuaire du Saint-Sacrement

Quel geste ouvrira nos yeux ?

À priori, les deux disciples en route vers Emmaüs
avaient tout pour croire :
Ils ont longuement fréquenté Jésus ;
ils sont de ceux qui ont tenu bon
et n’ont pas abandonné Jésus
quand il montait à Jérusalem.
Ils ont mis en lui leur espérance.
Ils ont reconnu en lui un prophète
puissant en œuvre et en parole
devant Dieu et devant tout le peuple (Lc 24,19).

Certes, il y a eu l’échec terrible de la mise en croix,
mais ils ont eu le témoignage des femmes
qu’ils connaissaient bien,
qui ont trouvé le tombeau vide
et qui ont eu une vision d’anges
affirmant que Jésus est vivant.

Ils ont même eu la confirmation du tombeau vide
par plusieurs de leurs compagnons.

Est-ce que cela ne suffit pas pour comprendre
que la mort n’a pas eu le dernier mot ?

Est-ce que cela ne suffit pas pour – au moins –
rester avec les autres disciples
et attendre que ce salut se manifeste ?

Non…
Tout cela ne leur a pas suffi !

Pourquoi ?
D’abord parce qu’ils avaient beau être disciples de Jésus,
ils n’avaient pas compris
que Jésus n’est pas venu pour régler nos problèmes.
Il est venu pour nous donner Dieu.
Il n’est pas venu pour faire de nous des gens à part,
des espèces de surhommes qui n’ont plus de problèmes :
Il est venu pour nous donner Dieu.

Mais il y a aussi une deuxième raison.
Pour eux la croix est insupportable, inadmissible.
La libération d’Israël ne peut pas advenir
avec la croix plantée là dans cette histoire.

Les anges peuvent bien le dire vivant,
la croix reste un obstacle infranchissable
pour croire que Jésus soit Sauveur.

Ô « sans intelligence, cœurs lents à croire
à tout ce qu’ont dit les prophètes ! (Lc 24,25)

Car les prophètes l’ont dit :
le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes
en s’accablant lui-même de leurs fautes (Is 53,11).

« N’est-ce pas cela que devait souffrir le messie
pour entrer dans sa gloire ? » (Lc 24,26)

Tout l’accompagnement de Jésus,
tout son enseignement sur la route de Jérusalem à Emmaüs
tourne autour de cela :
il fallait que le Messie souffre cela
pour entrer dans sa gloire.
Et il faut que vous, à votre tour,
vous acceptiez cette croix de Jésus !

Il n’y a pas d’autre chemin pour la gloire,
la gloire que donne le Père.

Jésus n’invite pas les deux disciples
à oublier la croix,
ou à la relativiser, au contraire,
il les conduit à en découvrir la nécessité.

S’ils continuent à rejeter la croix,
ils ne peuvent entrer dans la joie de la résurrection.

Peut-on récolter sans d’abord semer ?

Le cœur des disciples brûle.
Ils perçoivent la vérité de ce que leur enseigne
cet étrange « paroissien » (Lc 24,18),
mais ils ne le reconnaissent pas et la joie n’éclate pas.

Il faudra un geste de Jésus,
un geste qui dise bien, qui dise clairement
que la croix ce n’est pas un échec
mais un don de soi qui fait entrer dans la résurrection.

Quel geste peut dire le drame de la croix
où tout, tout est brisé
où tout s’éteint, tout disparaît,
et peut dire en même temps
que par cette même croix vienne la vie pour d’autres,
pour beaucoup d’autres ?

Quel geste va leur donner Dieu ?

C’est le geste que Jésus maintenant, ce soir,
va accomplir pour les disciples d’Emmaüs
que nous sommes tous.

Si tu es attentif, tes yeux vont s’ouvrir
et tu vas le reconnaître et tu ne pourras plus te taire.
Amen.

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