FMJ MtlVENDREDI DE L’OCTAVE DE PÂQUES – C
Frère Théophane
Ac 4, 1-12 ; Ps 117 ; Jn 21, 1-14
9 avril 2010
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Sensibles à sa Présence

Frères et sœurs, la nuit a été longue ;
à de nombreuses reprises,
le filet a été jeté en mer, puis remonté,
puis apprêté pour un nouveau lâché.
Mais rien.
Le filet remonte avec bien des algues,
bien des déchets ramassés par le courant,
mais aucune prise.
Le filet est vide de poisson, désespérément vide.
Rien de quoi soulager la fatigue
et donner sens à l’effort d’une nuit de veille.

Pourtant, le soleil se lève et avec lui,
un jour nouveau va commencer
et va embraser le cœur des disciples
et notamment celui de Pierre.
En ce jour, Pierre va vivre
une expérience formidable du Ressuscité.
Il va lui être donné de goûter,
de toucher quelque chose de son appel initial
et de l’approfondir.

En effet, quelques années auparavant,
après une nuit aussi besogneuse et manquée
que la nuit dernière,
le rabbi Jésus était monté à bord de la barque de Pierre.
De là, Jésus avait enseigné le peuple,
puis il avait invité Pierre
à avancer en eau profonde pour lâcher les filets.
Cette fois là, également,
le coup de filet fut si exceptionnel,
que Pierre, saisi de frayeur,
s’était jeté aux pieds de Jésus en lui disant :
« Éloigne-toi de moi, Seigneur,
car je suis un homme pécheur
» (Lc 5,8).
Loin de s’éloigner,
Jésus l’avait alors appelé à marcher à sa suite.

Lorsque Jésus appelle,
il touche le cœur de l’être humain
et le saisit au plus profond de son être.
Pierre n’avait pas oublié cet épisode
qui avait changé le cours de sa vie.
Alors, en ce matin, lorsqu’à l’invitation d’un inconnu
le coup de filet s’avère exceptionnel
et que le disciple bien-aimé
reconnaît le Seigneur présent sur le rivage,
Pierre ceint son vêtement et plonge.
Le cœur de Pierre s’est embrasé d’amour.
L’amour le presse à plonger
pour se tenir auprès de son Seigneur.

Pierre se sait pécheur.
Sans doute même
a-t-il une conscience plus vive de son péché
que de ce jour où il s’était écrié aux pieds de Jésus :
« Éloigne-toi de moi, Seigneur,
car je suis un homme pécheur ».
Malgré une déclaration solennelle de fidélité,
n’a-t-il pas aux jours de la Passion
renié à trois reprises son Seigneur ?
Pierre est donc conscient plus que jamais de son indignité,
pourtant l’amour le presse.
Dans le regard de Jésus,
après ses reniements,
il a vu l’Amour.
Il a vu cet Amour qui n’est pas arrêté par le péché
et qui s’offre sur la croix.
Il a connu la profondeur de l’Amour de Jésus
pour lui, pour toi.

Alors, au matin de Pâques,
encore retourné par l’inattendu de Dieu,
il a connu que l’Amour est plus fort que la mort.
Il a accueilli la Paix du Ressuscité.
Cette Paix qui est plénitude de grâce, de bénédiction, de vie,
Pierre l’a accueillie avec les autres disciples
comme une pure grâce, une paix étrangère à tout mérite.

En ce petit matin, sur le bord du lac de Tibériade,
Pierre plonge pour rejoindre son Maître.
Il plonge dans les eaux de la miséricorde.
Il cherche la proximité du Seigneur.
Il cherche cette intimité,
seule capable de rendre féconde et bénéfique toute entreprise.
Dès lors, quand Pierre enseignera devant le peuple,
devant le sanhédrin, que le Crucifié est ressuscité,
il prêchera que l’amour a vaincu le péché et la mort.
Il le sait, lui qui a fait l’expérience
de la miséricorde de Dieu dans sa vie.
Cette expérience du Ressuscité,
Pierre l’a faite dans le cadre de sa vie de travail,
c’est-à-dire dans son quotidien,
dans ce que la vie a de plus ordinaire.

*

Frères et sœurs, avec la Résurrection,
un jour nouveau s’est levé.
Jésus est là, présent, sur la rive de ton existence,
présent à tes réussites comme à tes échecs.
Il est là, dans l’ordinaire de ton quotidien
et suscite des occasions
pour que tu le reconnaisses et goûtes à sa Paix.
Une Paix qui est le don de vivre
en sa présence et dans son intimité.
Un don qui transforme l’ordinaire du quotidien
en une réalité extra-ordinaire, une réalité divine.

Seigneur Jésus, tu es là
et tu ne cesses de venir à notre rencontre.
Bien souvent, nous passons sans te voir.
Comme Pierre, nous avons besoin d’un autre
pour te reconnaître présent.
Par cette Eucharistie,
donne-nous d’être spirituellement sensibles à ta Présence
afin de pouvoir témoigner
de ton œuvre de miséricorde dans nos vies. Amen.

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