FMJ MtlSamedi, 30e Semaine du Temps ordinaire – B
Fr. Antoine-Emmanuel
Rm 11, 1-2.11-12.25-29 ; Ps 93 ; Lc 14, 1.7-11
31 octobre 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Accepter de n’être plus rien pour devenir Tout

« Quand tu es invité par quelqu’un à des noces,
va te mettre à la dernière place » (Lc 14, 8…10).

« Quand tu es invité… »
N’est-ce pas nous qui avons été « invités » ?

Si nous sommes aujourd’hui dans cette église,
n’est-ce pas parce que le Seigneur nous a invités.

Si nous sommes chrétiens,
si nous sommes membres de la famille-Église,
si nous aimons la Parole de Dieu,
si nous bénéficions des merveilles que sont les sacrements,
c’est que nous avons été invités.

Merci, Seigneur, de nous avoir invités à Te suivre,
à vivre de Toi, à vivre éternellement en Toi.

Nous avons été invités, donc il nous faut chacun
aller nous mettre à la dernière place.
Dans tout ce que nous vivons en Église,
va te mettre à la dernière place.

Si nous faisons cela, que se passera-t-il ?
« Ton hôte » viendra et te dira
« Ami, monte plus haut ! » (cf. Lc 14,10)

La sainteté, c’est cela !
Toi tu descends et le Seigneur te dit :
« Ami, monte plus haut ! »

La sainteté, c’est une invitation,
puis une descente où le Seigneur nous élève !

Le Seigneur invite.
Le Seigneur appelle à la descente
et sa Parole nous en donne la force.
Le Seigneur nous élève.
La sainteté, c’est un chef-d’œuvre de Dieu.

***

Voici comment Pierre-Marie l’exprimait
dans son homélie du 1er novembre 1975
lors de la fondation de nos Fraternités à Paris :

« Le projet du Père est que nous soyons tous
avec la grâce de son Esprit, « des saints ».
Que tous, nous pouvons et devons devenir « saints » (1 P 1,15-16).

Vraiment « tous » ?

Oui, frères et sœurs ! Parce que nous sommes tous
les enfants de sa propre sainteté.
« Notre Père » est Dieu et un Dieu « trois fois saint ».
Nous sommes tous de ces terriens, fragiles et pécheurs,
ô combien !, mais dont l’Écriture nous dit aussi
que Dieu-Saint les a pétris de sa propre main,
pour mettre son souffle en leur poitrine
et son image dans leur corps (Gn 1,27 ; 2,7).
C’est ainsi qu’Il nous a tous élus en Lui
dès avant la création du monde pour être saints
et immaculés en sa présence dans l’amour (Ép 1,4).
Vous donc, vous serez parfaits
comme votre Père du Ciel est parfait (Mt 5,48).

Plus encore, voici que le Fils, à son tour,
venu tout rassembler en un seul corps,
de cette humanité que le péché avait brisée et dispersée,
nous a littéralement envahis de sa présence
aimante et salvatrice, en nous renouvelant de sa Vie.
« Dieu S’est fait porteur de la chair », dit saint Athanase,
« pour que l’homme puisse devenir porteur de l’Esprit ».
En se manifestant dans un homme, ce sont donc
tous les hommes qui dans le Fils, deviennent des fils (Ga 4,6),
lavés à jamais dans le sang versé pour la multitude (Mt 26,28).

Et dans l’Esprit enfin, le Temple royal tout entier,
prend sa forme renouvelée.
Car le Temple de Dieu est sacré
et ce Temple c’est vous ! (1 Co 3,17).
Dans le tangible de l’invisible,
jusqu’au secret de chaque cœur, sa grâce envahit tout,
guérit, éclaire, reconstruit, fortifie.
Malgré les lassitudes, les oublis, les refus,
inlassablement, universellement,
elle veut faire de chacun une maison divine (Ép 2,19-22).
Et de toutes ces pierres vivantes, ainsi assemblées,
un édifice spirituel qui forme un sacerdoce royal
et une nation sainte (1 P 2,4 ; 9).

Alors, notre faiblesse est-elle trop grande ?
Réjouissez-vous plutôt de ce que vos noms
sont inscrits dans les cieux ! (Lc 12,20).

Notre péché est-il trop manifeste ?
Ne vous tracassez pas, petit troupeau,
il a plu à votre Père de vous donner le royaume (Lc 12,32).

La laideur de ce monde, certains jours
est-elle trop loin de sa Lumière ?
Il y a beaucoup de demeures dans la Maison de mon Père ;
sinon Je vous l’aurais dit (Jn 14,2).

Mais enfin, il y a parfois des choses impossibles !
– Aux hommes oui, mais tout est possible à Dieu ! (Mt 19,26).
Et à celui qui croit (Mc 9,23).

Dieu peut donc tout ?
Oui, frères et sœurs, sauf nous contraindre à l’aimer.
Il suffit donc de consentir à ce don qu’Il nous fait.

C’est pourquoi, à « tous », ou à chacun, la sainteté est proposée.
Et « notre » sainteté n’est rien d’autre que l’accueil
de celle du Père notre Créateur, du Fils notre Frère aîné,
et de l’Esprit notre Ami.
Comme Marie, notre soeur et notre mère, l’a fait.
Chacun y est appelé quoi qu’il puisse être, ou eut été ;
qu’il puisse faire, penser ou avoir été.
Au nom même de cette sainte liberté
que Dieu a donnée à tous en partage (Rm 8,21).

Même le publicain pécheur :
Je vous le dis, celui-là rentre chez lui tout justifié (Lc 14,18).
Même le financier Zachée : Descends-vite, car aujourd’hui
Il me faut demeurer chez toi (Lc 19,5).
Même l’occupant étranger, le centurion romain :
En vérité, Je vous le dis, Je n’ai jamais trouvé
pareille foi en Israël (Mt 8,10).
Paul, le tueur de chrétiens, deviendra une colonne d’Église.
De Pierre, le renégat du Jeudi saint,
il fera le premier de tous les papes.
À Marie-Madeleine, dont Il avait chassé sept démons,
Il apparaîtra en priorité au matin
du premier jour de la semaine (Mc 16,9).
Les prostituées elles-mêmes peuvent se convertir,
au point d’en précéder finalement beaucoup
dans le Royaume de Dieu (Mt 21,31).
Et, pour tout dire, l’assassin condamné à être crucifié à ses côtés,
sera le premier de tous les saints canonisés,
par le Fils de Dieu même :
Ce soir, tu seras avec Moi, en Paradis (Lc 23,43).

Comment dès lors ne pas ressentir le désir
de s’ouvrir de tout son cœur à un don pareil (Jn 4,10).
Notre sainteté ne peut consister qu’à l’accueillir.
À reproduire en nous le visage du Fils (Rm 8,29).

Ce Christ, parfaite image de Dieu pour l’homme,
et de l’homme pour Dieu ;
Dieu passionné pour l’homme, dans un homme passionné de Dieu.

Oui, notre sainteté consiste à faire à notre tour
ce mariage d’union au cœur de notre cœur,
entre le Dieu qui nous habite parce qu’Il nous a créés,
sauvés et sanctifiés, et l’homme que nous sommes,
tel qu’il a été façonné, demeure appelé
et reste destiné à être tout entier sanctifié dans la vérité (Jn 17,19).

***

Frères et sœurs, n’ayons pas peur de descendre.
Nous descendrons dans les bras de Dieu
et Lui nous élèvera tout contre son cœur.
Nous goûterons son amour comme jamais !
Je termine avec ces mots de Pierre-Marie :
« La sainteté c’est accepter de n’être plus rien pour devenir Tout.
Le rien du Tout ».

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