FMJ MtlBx Charles de Jésus, ermite et missionnaire au Sahara, 1916
(Jeudi, 1ère Semaine de l’Avent – B)
Frère Antoine-Emmanuel
Gal 3, 26-29 ; Ps 39 ; Jn 15, 9-17
1er décembre 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Frère Charles, reflet de Jésus

« C’est la plus belle âme que je connaisse
– écrit en septembre 1901 le Père Henri,
prieur de la Trappe de Staouéli
à Monseigneur Guérin, préfet apostolique du Sahara –
d’une générosité incroyable,
il s’avance à pas de géant dans la voie du sacrifice,
et a un désir insatiable de se dévouer
à l’œuvre de la rédemption des infidèles.
Il est capable de tout
– sauf peut-être d’accepter une direction (spirituelle) trop étroite.
Ayant vécu 10 mois dans son intimité,
j’ai été profondément édifié de sa vertu héroïque.
Il y a en lui l’étoffe de plusieurs saints ».

Charles de Foucauld… un grand saint.
Et les saints sont pour nous comme les étoiles
qui aidaient jadis les navigateurs à orienter leur route.
Chaque saint est un reflet unique du Christ.

Aujourd’hui nous pouvons vérifier notre route, notre cap
grâce à ce reflet vivant de Jésus qu’est frère Charles.
Je vous propose de le faire
à partir de deux moments de la vie de Charles.
Deux discernements, deux décisions, deux départs.

*

Tout d’abord le départ de la Trappe.
Charles, après un itinéraire plus que mouvementé
entre à la Trappe Notre-Dame des Neiges le 16 janvier 1890.
Il a 32 ans.
Il passe quelques mois aux Neiges,
6 ans dans une Trappe en Syrie,
puis un an à la Trappe de Staouéli en Algérie.

Mais pourquoi Charles quitte-t-il la Trappe ?
Puisqu’il veut une vie simple et pauvre à la suite de Jésus,
pourquoi ne pas rester dans la Trappe très pauvre de Staouéli ?
À cause d’un désir.
Un désir brûlant de ressembler à Jésus,
d’imiter Jésus par une vie de pauvreté, d’abjection, de pénitence.
« Vous espérez que j’ai assez de pauvreté…
écrit-il à l’abbé Huvelin.
Non, nous sommes pauvres pour des riches,
mais pas pauvres comme l’était notre Seigneur,
pas pauvre comme je l’étais au Maroc ».

Il veut aller plus loin dans le don de soi.
Mais il ne le fera que dans l’obéissance à ses supérieurs.
Ce n’est que dans l’obéissance
qu’il pourra aller au-delà de l’obéissance religieuse.
De fait les supérieurs de la Trappe
reconnaissent sa vocation particulière
et le dispensent de ses vœux.

Où va-t-il ?
Petit à petit avait germé dans son cœur
le désir de « fonder une petite congrégation
vouée à imiter la vie de Jésus de Nazareth,
dont les membres vivraient pauvrement de leurs mains,
en petits groupes comme une famille.
Ils suivraient à la lettre tous les conseils évangéliques
et nourriraient leur contemplation par une prière très simple,
accessible à tous. »

Où va Charles ?
Il va à Nazareth pour y vivre la vie cachée de Jésus.
Il ouvre ainsi à la vie consacrée un nouveau sillon.

Tout y est centré sur la personne de Jésus.
Ce ne sont pas les œuvres de charité qui priment
ni un idéal de prière
ni un modèle de vie commune,
mais Jésus.
Seulement Jésus, à Nazareth,
dans la pauvreté, la grande simplicité.
Charles médite longuement l’Évangile
pour s’imprégner du style de Jésus,
et vit de longues heures d’adoration eucharistique.
Et nous, frères et sœurs, et moi…
est-ce que nous restons cantonnés
dans une pauvreté confortable et une obéissance sécurisante ?
Ou bien nous allons avec Charles
dans l’accomplissement de la loi, de la règle
qu’est la fidélité radicale à Jésus ?

*

Le deuxième moment de la vie de Charles
que nous pouvons scruter ce soir
c’est son départ de Terre Sainte.
Pourquoi Charles, épris de Jésus
et heureux de « demeurer dans son Amour »
dans la pauvreté de Nazareth,
plie-t-il bagages pour aboutir en octobre 1901
dans les dunes et les rocailles du Sahara ?

Voici comment Petite sœur Annie de Jésus explique ce départ :
« La contemplation de l’Eucharistie
révèle à Charles que communier au Corps et au Sang du Christ
le destine à devenir, lui aussi, un homme mangé.
La Parole de Dieu si souvent méditée l’interpelle :
il sent brûler en lui le feu que Jésus est venu porter sur la Terre
et il veut porter ce feu aux plus pauvres,
aux plus abandonnés, aux plus exclus » (SV, p. 20).

« Il faut aller, écrit-il,
non pas là où la terre est la plus sainte,
mais là où les hommes sont les plus abandonnés » (id.).
Charles prie et constate qu’il n’est appelé
ni à la prédication,
ni à la vie au désert.
Il veut aller vivre la vie de Nazareth
parmi les « âmes les plus malades », les plus abandonnées.
C’est clair pour lui :
il ne s’agit pas d’aller « là où il y aurait
le plus de chance humaine d’avoir des novices,
des autorisations canoniques,
de l’argent, du terrain, des appuis;
mais là où Jésus irait » (cf. Marguerite C. du P., p. 291),
c’est-à-dire au milieu de ceux qui ne connaissent pas Jésus,
au milieu des âmes les plus délaissées.
Et c’est cela qui le mène parmi les hommes du désert.
Non pas pour le désert ;
mais pour les hommes.
Non pas pour prêcher,
mais pour vivre Nazareth au milieu d’eux
dans une vie simple
où tous seront accueillis, aimés, servis
par celui qui devient plus que jamais frère universel.

Là encore le Seigneur a ouvert à travers Charles
un nouveau sillon à la vie consacrée.
Une vie toute centrée sur Jésus
au milieu des âmes les plus délaissées.

Et nous, frères et sœur…
notre âme est-elle celle d’un frère, d’une sœur universelle ?
Cela se fera en nous comme en Charles
dans la mesure où tout en nous se recentrera sur Jésus.

*

Bienheureux frère Charles, nos fraternités te doivent tant ;
notre fondateur te doit tant…
Aide-nous par ton intercession
à ne rien préférer à Jésus.
Amen.

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