FMJ MtlMercredi, 27e Semaine du Temps ordinaire – C
(Bse Marie-Rose Durocher)
Frère Antoine-Emmanuel
Ga 2, 1-2.7-14 ; Ps 116 ; Lc 11, 1-4
6 octobre 2010
Église St-Gervais, Paris

Tu es un don unique

La lettre aux Galates que la liturgie nous offre à méditer ces jours-ci
contient de magnifiques confessions de l’apôtre Paul.
Paul y dévoile beaucoup de sa vocation,
de sa personnalité, de son histoire.
C’est ainsi que ce soir nous l’avons entendu affirmer avec clarté ceci :
« Si l’action de Dieu a fait de Pierre l’apôtre des juifs,
elle a fait de moi l’apôtre des païens » (Gal 2,8).
Si nous laissons cette parole retentir en nous,
elle nous mène à nous questionner :
et nous, frères et sœurs, de qui sommes-nous apôtres ?
Celui qui a agi en Pierre, en Paul,
agit aussi en chacun de nous
pour faire de nous des apôtres du Christ.

Apôtre ?
L’apôtre n’est pas seulement celui qui enseigne,
il est l’envoyé personnel d’un autre.
L’apôtre de Jésus est l’envoyé personnel de Jésus,
il est comme sa présence.
Nous pouvons ainsi nous interroger :
auprès de qui ai-je été envoyé pour être présence du Christ ?

Ce soir il nous est donné de reconnaître
notre dignité d’envoyés de Jésus, d’envoyés du Fils de Dieu.
L’Esprit-Saint agit en chacun de nous
pour que nous portions effectivement le Christ
là où nous sommes envoyés :
dans tel milieu, dans tel environnement familial, professionnel, social.
Tous nous sommes apôtres !
C’est une dignité… et c’est aussi une responsabilité.
Paul ne s’est pas dérobé… et toi ? Et moi ?

Est-ce que notre vie parle de Jésus ?
Est-ce que ceux qui n’ouvrent jamais un Évangile
trouvent en nous un Évangile vivant ?
Car notre vie peut devenir une page bien lisible de l’Évangile !
La question vaut pour nous tous,
y compris pour nous moines et moniales.

Mgr Kasimir Nietzch nous disait à Varsovie
que la vie monastique vécue en ville
est « une nouvelle forme d’évangélisation ».

*

Mais revenons pour un moment à la confession de Paul.
Paul nous raconte qu’après 14 ans de ministère,
il monta à Jérusalem.
Et là, Pierre et les anciens de l’Église, nous dit-il,
ont su reconnaître la grâce qui a été confiée (à Paul) (cf. 2,9).

Frères et sœurs est-ce que ce n’est pas là une belle manière,
une manière excellente d’être pour les autres une page d’Évangile
quand nous savons voir en l’autre le don de Dieu,
le don unique, particulier que Dieu a déposé en lui, en elle ?
Comme Pierre a su le voir en Paul,
sachons poser sur les autres ce regard d’émerveillement ;
toi, mon frère, toi ma sœur, tu portes un don unique.
Comme le disait le Cardinal Newman : « tu as une mission
et personne d’autre ne pourra la remplir à ta place. »
Hans Urs von Balthasar va plus loin ; il dit : « tu es une mission ».

Quel bien nous pouvons nous faire les uns aux autres
en reconnaissant l’œuvre de Dieu en l’autre !
Souvenez-vous comme un Ambroise
a reconnu le don de Dieu en Augustin.
Un François d’Assise l’a reconnu en Antoine de Padoue.
Comme l’Abbé Huvelin l’a reconnu en Charles de Foucauld,
le Père Perrin l’a reconnu en Simone Weil.

Quelle merveille quand la jalousie se tait
et que nous savons voir et reconnaître l’œuvre de Dieu
qui travaille constamment les cœurs,
qui ciselle la sainteté en chacun.

Y aurait-il eu un Bienheureux Jerzy Popiełuszko
s’il n’y avait pas eu un curé admirable
qui a reconnu le charisme de ce jeune prêtre
et lui a confié la Messe pour la patrie.

Pierre a reconnu la grâce de Dieu en Paul.
Paul l’a reconnue en Pierre.
Et cela est allé loin : jusqu’à ce signe d’un grand amour
qu’est l’exhortation fraternelle faite à Pierre à Antioche.
Une exhortation faite avec dextérité, avec respect,
non par colère mais par amour :
« Pierre, pourquoi forces-tu les païens à judaïser ?
Pourquoi n’es-tu pas fidèle à la grâce de Dieu ? »
Le « pourquoi » aura fait son chemin dans le cœur de Pierre.
Quel grand amour de la part de Paul !

*

Frères et sœurs, tout cela est séduisant, appelant,
mais où puiser la force pour que notre vie
devienne Évangile pour les autres ?
Où puiser la lumière pour reconnaître
l’œuvre de Dieu en nous et en tout homme ?
Où puiser l’amour pour prendre soin de l’autre ?

La réponse nous vient dans l’Évangile de ce jour.
Nous y voyons les apôtres demander à Jésus :
Seigneur apprends-nous à prier…
non pas seulement parce que ta manière de prier nous impressionne,
mais parce que nous voyons les fruits de force,
de lumière et d’amour qu’elle porte dans ton humanité !
Seigneur, apprends-nous à prier
pour que la prière nous transforme,
pour qu’elle nous remplisse de Force, de Lumière et d’Amour !

*

Quand vous priez, ne dites pas simplement « Dieu » :
dites « Père » !
Quand vous priez, tournez-vous franchement vers le Père
ne désirant au fond rien d’autre
que la sanctification de son nom et la venue de son règne.
Quand vous priez, priez vraiment en enfants du Père.
Et demandez-lui ce dont vous avez besoin pour le glorifier
et pour que le monde entier s’ouvre à son règne d’Amour.
Demandez-Lui le pain.
Et le pain c’est tout ce dont notre corps, notre esprit, notre âme
ont besoin pour vivre, pour grandir : c’est la Force, la Lumière, l’Amour.
Demandez-Lui le pardon, car c’est Lui seul qui en est la source.
Demandez-Lui de vous garder à l’heure de la tentation
parce qu’elle viendra, peut-être ce soir.

Oui frères et sœurs,
que notre prière soit en vérité celle d’enfants de Dieu.
Voilà ce que nous vivons en célébrant l’Eucharistie.
La célébration de l’Eucharistie,
tout comme l’adoration eucharistique est tournée vers le Père
exactement comme Jésus nous l’a enseigné
et comme Jésus le désire ce soir.
C’est Lui qui est présent,
c’est Lui qui nous entraîne maintenant vers le Père.

Père, infiniment bon vers qui montent nos louanges,
que ta volonté soit faite. Amen !

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