FMJ MtlSamedi, 3e Semaine de l’Avent – C
Frère Antoine-Emmanuel
Jg 13, 2-7.24-25 ; Ps 70 ; Lc 1, 5-25
19 décembre 2009
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Revêts la beauté de la gloire de Dieu

Luc situe le début de son Évangile
au Temple de Jérusalem.
Nous y voyons
toute la solennité sacrificielle de ce lieu saint,
avec un prêtre -seul – qui y officie.
Mais on y découvre aussi
le refus de croire
et, dès lors, le mutisme.

À la fin du récit évangélique
situé également dans le Temple,
tout est renversé :
on ne parle plus de solennité, de sacrifice
et, nous dit Saint Luc,
« ils étaient (pluriel) sans cesse
dans le Temple à louer Dieu » (Lc 24, 53).

Nous voyons dans ces quelques versets
tout l’itinéraire de l’Évangile :
passer de la solitude à la communion,
du mutisme à la louange,
du doute à la foi,
de la tristesse à la joie
parce que l’Évangile est entré dans les cœurs.

*

Là haut, dit le Psaume, pour le soleil il dressa une tente,
et lui, comme un époux qui sort du pavillon,
il se réjouit, vaillant, de courir sa carrière…
et rien qui puisse échapper à sa chaleur (Ps 18(19) 6-7)

Ce soleil, frères et soeurs,
cet Évangile qui illumine le coeur,
c’est le Christ
qui vient nous rejoindre dans la solitude,
le mutisme, le doute et la tristesse,
pour nous emmener vers la communion, la louange, la foi, la joie.

Frères et sœurs, est-ce que nous laissons aujourd’hui le Seigneur
se lever dans nos cœurs ?

C’est cela que Zacharie a tardé à faire.
Gabriel lui annonce un don extraordinaire
qui répond à son désir
et le dépasse d’une manière incroyable.
« Il sera joie pour toi et exultation.
Beaucoup se réjouiront de sa naissance » (Lc 1,14).

La réponse de Zacharie n’est pas
« Comment cela se fera-t-il ? » (Lc 1,34)
c’est à dire : je crois à ce que tu m’annonces.
Dix-moi comment cela va se dérouler ?

Mais « d’après quoi en être sûr ? »
D’après-quoi connaîtrais-je cela ? »

Abraham avait fait la même demande à Dieu :
« Mon Seigneur Dieu à quoi saurai-je
que je posséderai ce pays ? » (Gn 15,8)
Et Dieu lui a donné le signe du brandon de feu
qui passa au milieu des animaux partagés. (cf. 15,17)

À Zacharie, Dieu ne donne pas de signe.
Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas cru aux paroles de l’ange.
Et pourtant Zacharie est un homme juste
qui suivait les commandements et les observances de Dieu
d’une manière irréprochable.

Il faudra que Dieu lui ôte la parole
pour qu’il s’ouvre à la Parole.

La joie explosera alors en lui,
Zacharie prophétisera dans l’Esprit-Saint
et bénira le Seigneur à plein cœur,
mais seulement quand il verra de ses yeux la promesse accomplie.

Il a comme la joie et l’exaltation de l’accomplissement,
mais il n’a pas connu la joie de la foi,
la joie de croire
la joie d’attendre l’accomplissement de la promesse.
Zacharie n’a pas accepté d’être mis à part
pour être de « ceux qui ont par avance espéré
dans le Christ » (Ép 1,12).

Car il y a la joie de l’espérance et la joie de la possession.
Il y a la joie du montagnard
qui gravit le sentier sans voir le sommet,
et la joie du sommet atteint.

*

Frères et sœurs, le Seigneur nous invite aujourd’hui
à la joie de croire.
La joie d’Abraham exultant
en voyant le jour du Christ qui venait (cf. Jn 8,56)
La joie de Moïse
qui, comme s’il voyait l’invisible, tint ferme (Hb 11,27).
la joie du psalmiste qui proclame :
« J’ai foi lors même que je dis
je suis trop malheureux » (Ps 115(116B)10)
la joie de Marie,
bienheureuse parce qu’elle a cru ! (cf. Lc 1,45)

Cette joie-là ce n’est pas la joie du ciel,
parce que nous sommes encore ici-bas;
mais c’est déjà la joie du ciel
qui scintille dans nos cœurs.

Car la joie, la vraie joie, il n’y en qu’une.
Et si nous sommes les uns et les autres dans la joie
c’est à la même joie que nous communions.

La joie c’est l’Émerveillement de l’Amour
l’émerveillement devant l’Amour.
La joie, l’unique joie,
vient de Dieu,
elle est de Dieu,
elle est divine et elle s’avance vers nous
tout au long de l’histoire.
Ou plutôt, elle nous appelle, elle nous attire.
Entre dans la joie de ton maître (Mt 25,21).

Parce que la joie est émerveillement devant l’Amour,
c’est d’elle que nous vivons par grâce dans l’éternité
dans le continuel émerveillement du Ciel.
Et parce que l’Amour ne passera jamais (1 Co 13,8).
L’enjeu pour nous est de ne pas attendre
pour en vivre et pour la partager.
Zacharie a dû attendre
dans la tristesse, la solitude et le mutisme.

Mais nous, aujourd’hui,
laissons se lever en nous le soleil du Christ ;
laissons sa joie parfaite
se frayer son chemin
en guerrier victorieux de nos peurs
et de notre volonté de puissance.

Jérusalem, quitte ta robe de tristesse
et revêts pour toujours
la beauté de la gloire de Dieu ! (Ba 5,1).

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