FMJ MtlJOURNÉE DE PRIÈRE POUR LA SAUVEGARDE DE LA CRÉATION
Frère Antoine-Emmanuel
Sg 13, 1-9 ; Ps 64 ; Mt 6, 25-33
1er septembre 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Pour une conversion écologique

Quelle surprise en revenant de notre retraite d’été :
un plant de courge magnifique avec ses grandes feuilles
et une courge superbe
… alors que nous n’avions rien planté.

Ce n’est pas un miracle,
cela vient d’une semence déposée dans le compost
il y a quelques années.

Ce n’est pas un miracle,
mais c’est une parole de Dieu.
La création nous parle.
Elle est un grand livre qui nous enseigne.

Cette courge illustre la générosité de la création
qui dépasse de loin notre labeur.
Il suffit de penser à un grain de blé qui donne 100 pour 1.

Cette courge dit aussi la beauté de la création,
beauté toute simple, non prétentieuse,
qui réjouit nos cœurs.

Elle dit aussi la nécessité de la création.
C’est la nature qui, quotidiennement,
assure notre subsistance.

Mais il faut aller plus loin
et contempler de l’intérieur ce fruit de la terre.
D’où vient-il ultimement ?
Qui nous le donne ?
Certains diront « Dame Nature ».
Nous dirons notre « sœur »
et même notre « Mère la Terre ».
Mais au-delà…
Au-delà, ce fruit est don de Dieu, don du Père.
Et parce qu’il vient du Père
comme nous venons du Père,
il y a entre nous et ce fruit un lien au-delà du visible.
Nous appartenons à la même création.
Aussi nous ne pouvons traiter la terre et ses fruits
comme des choses dont on peut user et abuser sans limite.

Mais il y a plus.
Ce fruit de la terre, parce qu’il vient du Père,
ne peut pas être pour moi seul.
La création toute entière est confiée à tous
pour que tous en prennent soin,
de telle sorte que tous, aujourd’hui et demain,
puisse vivre en harmonie avec elle,
dans le partage,
dans un partage qui favorise les plus démunis.

Voilà ce que dit notre courage.
Mais creusons un peu plus
et je vais reprendre amplement
des paroles du Pape François
dans son encyclique « Laudato Si »
où il nous invite littéralement
à une conversion écologique.

Le terme nous fait sourire mais en réalité,
il s’agit d’une conversion du cœur
et de la vie qui est très exigeante
et qui sans aucun doute est ce que le Seigneur
nous demande aujourd’hui.

Le Pape François cite un extrait
d’une homélie du Pape Benoît XVI qui disait ceci :
« Les déserts extérieurs se multiplient dans notre monde
parce que les déserts intérieurs sont devenus très grands ».

Les déserts extérieurs, ce sont toutes les mise-à-sac,
le pillage de la création par notre société
qui consomme toujours plus
et a fait de la consommation son principe d’existence.

Le désert intérieur des âmes crée le désert extérieur.
Tout est lié, tout est relié.
Notre manière de vivre, notre style de vie
ont des impacts réels et très marquants sur les autres,
sur les pauvres en particulier
et sur toute la création.

« La crise écologique est un appel
à une profonde conversion intérieure : (No. 217)
une « conversion écologique
qui implique de laisser jaillir toutes les conséquences
de (notre) rencontre avec Jésus-Christ
sur le monde qui (nous) entoure » (Id.).
« Vivre la vocation de protecteurs de l’œuvre de Dieu
est une part essentielle d’une existence vertueuse.
Cela n’est pas quelque chose d’optionnel » (Id.).

Le Pape cite une déclaration des évêques d’Australie
qui a de quoi nous réveiller…
« Pour réaliser (la) réconciliation (avec la création)
nous devons examiner nos vies
et reconnaître de quelle façon
nous offensons la création de Dieu
par nos actions et notre incapacité d’agir » (No 218).

Ce serait tellement significatif si chacun de nous
dans notre prochaine confession,
nous nommions les « offenses à la création de Dieu »
que nous avons commises
et que nous nous engagions sur le chemin de la conversion.

Cette conversion, nous dit le Pape,
ne peut être seulement individuelle,
elle doit être communautaire.

Et là, je bénis le Seigneur pour les petits pas
que nous avons pu faire ici tels nos deux petits jardins,
le compost, la ruche sur le toit du Sanctuaire,
ou le premier plant de tomate en « libre-service »
près du Bazar.
Mais, ce ne sont que des premiers pas.

Que demande cette conversion ?

« 220. Cette conversion suppose diverses attitudes
qui se conjuguent pour promouvoir
une protection généreuse et pleine de tendresse.
En premier lieu, elle implique gratitude et gratuité,
c’est-à-dire une reconnaissance du monde
comme don reçu de l’amour du Père,
ce qui a pour conséquence
des attitudes gratuites de renoncement
et des attitudes généreuses même si personne
ne les voit ou ne les reconnaît :
« Que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite […]
et ton Père qui voit dans le secret, te le rendra » (Mt 6, 3-4).
Cette conversion implique aussi la conscience amoureuse
de ne pas être déconnecté des autres créatures,
de former avec les autres êtres de l’univers
une belle communion universelle.
Pour le croyant, le monde ne se contemple pas de l’extérieur
mais de l’intérieur, en reconnaissant les liens
par lesquels le Père nous a unis à tous les êtres.
En outre, en faisant croître les capacités spécifiques
que Dieu lui a données,
la conversion écologique conduit le croyant
à développer sa créativité et son enthousiasme,
pour affronter les drames du monde en s’offrant à Dieu
« comme un sacrifice vivant, saint et agréable » (Bm 12, 1).
Il ne comprend pas sa supériorité
comme motif de gloire personnelle
ou de domination irresponsable,
mais comme une capacité différente,
lui imposant à son tour une grave responsabilité
qui naît de sa foi. »

Voilà quelques orientations,
mais l’essentiel est une décision du cœur.
Le Pape au début de son encyclique
affirme que le monde peut changer.
Voilà la clé.
Est-ce que nous croyons cela ?
Ou bien sommes-nous enfermés dans un pessimisme athée ?

C’est dans l’Eucharistie
que nous puiserons chaque jour
de nouvelles énergies pour cette conversion écologique.
Là, le fruit de la terre et du travail des humains
devient le Pain du Ciel.
Là, nous confessons que tout vient de Dieu,
que tout vient de l’Amour
et que l’Amour est plus fort que le péché et la mort.
L’Amour attire à Lui le pain et le vin
et en fait le sacrement de la communion qui rassemble l’humanité.

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