FMJ MtlSamedi, 24e Semaine du Temps ordinaire – C
Frère Antoine-Emmanuel
1 Co 15, 35-37.42-49 ; Ps 55 ; Lc 8, 4-15
18 septembre 2010
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Lectio divina

« Chaque jour, dans l’après-midi,
ouvre ton cœur à la méditation des Écritures
et, dans la gratuité de la lectio divina,
laisse l’Esprit Lui-même façonner en toi une âme de disciple
et ouvre-toi à la joie de sa Présence divine ».
dit notre Livre de vie au chapitre Prière (n° 21).

Et il précise au chapitre Accueil :
« Préserve coûte que coûte ton temps,
précieux entre tous, de lectio divina, chaque après-midi.
C’est pour toi, et plus particulièrement dans la vie urbaine,
un point essentiel et vital » (n° 47).

Voilà le grand trésor de la vie monastique !
Mais est-ce réservé aux moines ?
Ainsi répond Saint Jean Chrysostome :
« D’aucun parmi vous disent :
‘Je ne suis pas moine, j’ai une femme et des enfants
et les affaires de mon foyer dont j’ai la charge (…)’
Tu estimes la lecture des Divines Écritures
réservée aux seuls moines,
alors qu’elle te serait bien plus nécessaire qu’à eux.
Qui vit au milieu du monde et y reçoit chaque jour des blessures
a bien plus grand besoin de remèdes.
Aussi y a-t-il encore un plus grand mal que de ne pas lire,
c’est de croire la lecture vaine et inutile » (Sur Saint Matthieu 2,5).

Nous avons tous besoin de ces temps d’écoute de la Parole ;
de ce moment quotidien où nous appuyons intérieurement
sur notre touche « Escape » :
nous laissons tous les programmes en cours
qui siphonnent nos énergies
pour nous arrêter,
pour invoquer l’Esprit Saint,
pour lire un passage de l’Écriture,
pour le méditer, le décortiquer,
puis le mâcher, le ruminer.
Pour le laisser nous déranger,
nous gêner,
nous réveiller,
nous interpeller,
nous convertir,
pour nous laisser saisir dans la rencontre de Dieu
dont le Passage est le lieu de rendez-vous.
Lieu où je me rends,
où je me laisse enseigner, aimer, visiter.
Et tout cela pour que mon quotidien en soit réformé,
transformé parce que mon cœur aura été visité.

La lectio divina !
La lecture divine dont l’Évangile de ce jour
nous donne des clés tellement précieuses.

D’abord une première certitude :
le Semeur est sorti pour semer.
Le Père sème son Verbe.
Le Fils sème sa Parole.
Toute l’initiative est de Dieu.
Quand tu ouvres ta Bible,
sache que tu ouvres la route
à Celui qui est déjà en route vers toi.
Il attendait.
Tu lui as ouvert.

Il y a ensuite cette autre certitude :
la semence qu’Il sème est d’une fécondité extraordinaire.
Saint Luc dit d’ailleurs : le Semeur sort semer SA semence.
C’est sa propre semence.
C’est Lui-même, c’est sa propre Vie qu’Il sème.
Ce qui est semé en toi, ce qu’il te faut chercher et accueillir,
ce ne sont pas tant des idées ou des émotions,
c’est de la semence de Dieu.
Ce peut être au-delà des sens parce que c’est de Dieu,
mais c’est une semence qui transforme une vie,
même si elle est petite comme une graine de sénevé.

La suite de la Parabole nous met en garde :
toi et la semence de Dieu
vous allez être confrontés à trois difficultés :
l’appétit de Satan qui vient voler ce qui est beau en toi ;
les épreuves du disciple, les moqueries,
les persécutions à cause de la foi ;
et les soucis, ou plutôt les séductions du monde,
ses richesses, sa volupté.

« Occhio ! » comme on dit en italien. Regarde bien !
Parce qu’en nous la semence qui nous fait revivre
risque d’être piétinée par notre insouciance.
Elle risque d’être délaissée par notre faiblesse dans l’épreuve ;
elle risque d’être asphyxiée par nos passions.

Cette prise de conscience
nous achemine vers la bonne terre de notre cœur.
Car cette bonne terre, elle est bien là en nous !
Nous sommes faits pour la Parole
et la Parole est faite pour nous…
Mais c’est en profondeur,
dans nos profondeurs d’humanité qui sont divines.

Mais Jésus nous en dit plus :
Il parle non seulement d’entendre la Parole
dans notre « cœur beau et bon » mais aussi de la « retenir »
et de « porter du fruit à force d’endurance », de persévérance.

Voilà le secret de la lectio divina :
retenir, garder la Parole.
La mémoriser dans la mémoire du cœur.
Telle qu’elle est, sans l’édulcorer.
Avec sa puissance, avec son feu,
je dépose la Parole dans le Tabernacle de mon cœur.
Et j’endure, je persévère…
Je garde jalousement ce trésor
et ce trésor me transforme peu à peu.
Il fait du fruit au centuple.
Et le plus beau fruit, c’est que notre vie
commence à ressembler à celle de Jésus !
Voilà ce qui fait la lectio divina
quand nous la pratiquons chaque jour
– fidèlement – courageusement.

À nous d’ouvrir la porte au Semeur.
À nous de croire en la puissance
de Sa semence aussi humble soit-elle.
À nous de la déposer en lieu sûr,
dans le profond de notre cœur.
Fais cela et tu verras paraître le plus beau de ce que tu es !

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