FMJ MtlVendredi, 23e Semaine du Temps ordinaire – A
Frère Antoine-Emmanuel
1 Tm 1, 1-2.12-14 ; Ps 15 ; Lc 6, 39-42
9 septembre 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

La blépo-thérapie

Excuse-moi,
toi tu ne le sais peut-être pas,
mais tu as un copeau dans l’œil,
une écharde, une petite paille,
et moi, je vais te l’enlever.

Que c’est dangereux…
parce que tu veux m’enlever ma paille,
et toi tu as une poutre dans ton œil,
et tu vas me blesser.

La petite parabole de Jésus est cinglante, presque ironique.
Elle nous dit combien nous pouvons nous tromper
et combien nous blesser
en voulant juger les autres.

On peut et on doit juger des attitudes,
des actes, des prises de paroles.
Oui.
Mais on ne peut jamais juger une personne.

Une personne, c’est une histoire
que je ne peux pas connaître vraiment.
C’est une ascendance familiale,
c’est une éducation, une culture.
Et surtout, une personne, c’est un mystère,
c’est un reflet unique de Dieu.
Et qui suis-je pour juger un reflet de Dieu ?

En même temps, il nous est si facile de juger.
Nous jugeons pour nous protéger.
Parce que le mal en nous et en l’autre
nous inquiète, nous fait peur.
Un jugement c’est un mur haut
comme le mur construit en Terre Sainte.

Comment nous départir du jugement ?
Comment nous départir du jugement sur nous-mêmes
et du jugement sur les autres
parce que l’un et l’autre vont de pair ?

Jésus, nous rapporte Saint-Jean,
n’a pas été envoyé dans le monde pour juger le monde,
mais pour que le monde soit sauvé par Lui. (cf. 3,17)

Et toi, et moi,
nous n’avons pas été envoyés dans le monde pour le juger,
mais bien pour être sauvés
et pour servir le salut du monde.

Comment y parvenir avec cette poutre qui nous colle à l’œil ?

La réponse nous est donnée par un regard.
Quel est le seul regard sans poutre ni paille
qui se soit posé sur les humains ?
C’est le regard de Jésus.

Le regard jugeant des autres nous pousse à juger à notre tour.
Mais le regard clair de Jésus nous désarme.

Prenez un jour, dans la prière,
du temps pour imaginer, pour regarder
le regard que Jésus pose sur vous.
Laissez-vous regarder par Jésus.

Il s’agit d’accepter un regard qui ne me juge pas
et qui m’aime en profondeur.

Nous commencerons par nous agiter, nous énerver,
parce que l’innocence du regard de Jésus
nous est incompréhensible.

Comment peut-il me regarder
sans m’identifier à mes travers, à mes péchés ?

Mais peu à peu, notre âme pourra se recueillir
dans ce regard du Seigneur
et consentir à ne pas être jugé,
comme la femme adultère l’a vécu :
« Moi non plus je ne te condamne pas » (Jn 8,11).

Prenez le temps de vivre cela dans l’oraison,
pour ensuite le vivre plus intimement encore dans l’Eucharistie.
Nous ferons alors l’expérience que décrit l’apôtre Paul :
« Je suis plein de reconnaissance
envers celui qui m’a donné la force,
le Christ Jésus notre Seigneur.
C’est Lui qui [m’a regardé,] m’a jugé digne de confiance
moi qui étais auparavant blasphémateur, persécuteur et violent.
Mais il m’a été fait miséricorde (…)
Oui, elle a surabondé pour moi
la grâce de notre Seigneur » (cf. 1 Tm 1, 12…15)

La grâce de Jésus a surabondé pour moi.
Un excès de grâce.
Un excès tel que nous ne pourrons plus juger les autres
mais seulement les bénir.

Souviens-toi:
je ne t’ai pas envoyé pour juger Montréal,
mais pour bénir Montréal ;
je ne t’ai pas envoyé pour juger tes collègues,
mais pour les bénir ;
je ne t’ai pas envoyé pour juger ta famille,
tes amis, ta communauté,
mais pour les bénir …

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