FMJ MtlSamedi, 25e Semaine du Temps ordinaire – A
Frère Antoine-Emmanuel
Za 2, 5-9.14-15 ; Ct Jr 31 ; Lc 9, 43-45
24 septembre 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Comme un aimant qui attire le monde vers le Père

« Le Fils de l’Homme
va être livré aux mains des hommes » (Lc 9,44).
Les disciples ne comprenaient pas cette parole.
De fait le « fils de l’Homme » raconté par Daniel
est une figure glorieuse qui s’avance vers Dieu,
uni à tous les saints,
et qui reçoit gloire et honneur. (cf. Dn 7, 13-14)
Comment ce « fils de l’homme » peut-il être livré à des hommes
pour faire de lui ce qu’ils veulent ?

L’évangéliste Saint Luc nous dit
que cette parole était voilée pour eux (cf. Lc 9,45).

Il faudra la conversion du cœur,
c’est-à-dire l’abandon à l’Esprit Saint
pour que cette parole se dévoile.
C’est par l’onction intérieure de l’Esprit Saint
que le Mystère pascal se dévoile
comme un rayon de soleil qui pour un moment
jaillit d’entre les nuages.
Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent (Lc 24,31)
dira Saint Luc des disciples d’Emmaüs.

*

Aujourd’hui nous demandons au Seigneur cette onction de l’Esprit
qui nous dé-voile le Mystère pascal de Jésus.
Si nous le demandons au Père, nos yeux vont s’ouvrir
et nous allons reconnaître dans le Saint Sacrement
Jésus qui s’offre au Père pour le monde entier.
Nous allons « voir » Jésus qui porte le monde entier au Père.
Et nous allons comprendre que le monde entier
est suspendu au Christ dans son Mystère pascal.

À travers l’Eucharistie, Jésus déploie dans le monde,
dans tout le cosmos,
sa puissance d’attraction
comme un aimant qui attire le monde vers le Père.

Il se « livre » au monde, comme s’Il s’y perdait
et Il ramasse le monde par l’attraction de son Amour,
pour le porter au Père.
C’est le grand « travail » de Jésus.

*

Qu’est-ce alors que l’adoration eucharistique ?
Ce n’est pas une passivité paresseuse.
C’est une participation à ce travail de l’Amour de Jésus,
dans une passivité amoureuse.

Nous sommes tous « consacrés » à ce travail.
Le Baptême est la première consécration.
On ne peut rien rêver de plus grand que le Baptême.
Par le Baptême nous sommes consacrés
à ce grand travail du passage de tout homme et de toutes choses
vers le Père.
Nous avons été embauchés pour cela !

Ce grand travail est le sens profond
de tous les services que nous rendons,
de toutes nos « bonnes œuvres »,
de notre labeur professionnel familial ou social.

C’est aussi le sens profond de notre vie de prière.
Nous avons été embauchés pour ce grand déménagement
et par la prière nous remplissons notre contrat !
Nous servons silencieusement le transvasement
du créé vers l’éternité.

C’est pour cela que la prière est un labeur, parfois très rude :
l’ennui, l’acédie, nous décourage ;
les distractions nous humilient ;
le démon nous pousse ou à délaisser la prière
ou à l’excès dans la prière.

Qu’est-ce qu’il nous reste ?
À persévérer en remettant à Dieu
ce combat qui est au-delà de nos forces.
Alors le combat de la prière n’est plus une erreur de parcours,
il nous unit à Jésus,
à son combat,
et donc à sa gloire de Fils;
et le grand téléchargement se fait :
la première création passe au Christ, et,
en Lui, se met à chanter et à glorifier le Père.

Quelles sont précieuses « nos » heures d’adoration.
C’est la prolongation directe de l’Eucharistie
qui est la Prière pascale par excellence.

Nous sommes là en Église au nom du monde entier
avec l’interdiction c’est-à-dire l’impossibilité d’exclure
qui que ce soit ou quoi que ce soit de notre prière.

Cela se passe en silence ;
pauvrement ;
de nuit ;
sans attendre ni gratification ni consolation
considérant comme une récompense
de ne pas avoir de récompense.

*

Souvenez-vous du Père Émile assis sur un banc,
le 3e ou 4e à votre droite, pendant des heures.
Il aimait aussi le banc de l’avenue du Mont-Royal
et le marchand de crème glacée,
mais là où il demeurait très très longtemps,
c’était le banc dans le Sanctuaire.
Père Émile est retourné vers le Père le
après une rude bataille avec un cancer.

Nul d’entre nous ne sait ce qui se vivait dans son cœur
lors de ces longues rencontres
avec le Seigneur dans l’adoration silencieuse.
Mais les fruits se voyaient :
fruits d’accueil des autres, de discrétion,
de charité dans son ministère auprès des personnes âgées
et ce fruit mûr qu’est la capacité de se défaire de cette vie,
de vivre la maladie
et de passer vers l’éternité sans se plaindre.

Et qui dira le fruit de sa prière, de son adoration sur le monde.
Il vivait ainsi sa responsabilité de baptisé
chargé de la grande élévation de toute la Création par Lui,
vers le Père, dans l’unité de l’Esprit.

Viens Esprit Saint, viens nous dévoiler le Mystère eucharistique
et que nous nous laissions appeler et séduire
pour vivre notre mission de baptisés, c’est-à-dire de consacrés.

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