FMJ MtlMardi, 3e Semaine de l’Avent – B
Frère Antoine-Emmanuel
Is 40, 25-31 ; Ps 102; Mt 21, 28-32
16 décembre 2014
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Je ne supporte pas d’être comme les autres

« Mon enfant, va travailler à ma vigne ».
« Oui » ont-ils répondu et ils n’y sont pas allés.

Jean-Baptiste est venu.
Jean-Baptiste a parlé, témoigné, enseigné, baptisé,
mais ils sont restés totalement hermétiques
aux appels de Jean.

Pourquoi cela ?
Pourquoi ce refus de se laisser déplacer,
de changer de posture ?
Pourquoi ?

Parce que ces gens avaient construit
toute une image d’eux-mêmes,
toute une apparence de religion,
de sincérité religieuse même,
de piété, de sainteté.
Et c’était pour eux très rassurant.
Ils étaient campés là, dans ce rôle,
dans cette position sociale et religieuse.
Et on les estimait, on les regardait,
voir même, on les enviait.

Ils étaient bien assis désormais dans un système
qui leur donnait fière allure devant les hommes
et même, au regard de la Loi, devant Dieu.

Or, qu’est-ce que Jean leur demande ?
Il leur demande de descendre de leur piédestal
et de se plonger dans le Jourdain,
exactement comme le faisaient
toutes sortes de gens, des gens pauvres, des gens ordinaires
et aussi des gens aux mœurs douteuses :
des trafiquants, des prostituées, des drogués…

Pour eux, c’est impossible.
« Je ne veux pas, je ne peux pas,
perdre cette posture que j’ai acquise.
Je ne veux pas être vu comme un pécheur.
Je ne veux pas être comme du monde ordinaire. »

Descendre eut été leur arracher le cœur.
Descendre eut été les mettre dans une fragilité,
une vulnérabilité qu’ils ne supportent pas.

Je préfère une fausse représentation de moi
qui me sécurise,
que la vérité qui dévoile ma faiblesse,
ma fragilité native, ontologique.

Je ne supporte pas la honte.
Je ne supporte pas d’être petit.
Je ne supporte pas d’être comme les autres.

Frères et sœurs… et nous ? Et toi ? Et moi ?

Voilà 10 jours que Jean-Baptiste
nous appelle à la conversion
et nous invite à nous mettre
dans la file des pécheurs.
Est-ce que nous l’avons entendu ?
Est-ce que cela a bougé en nous ?

Le livre de Sophonie nous dit aujourd’hui
que le Seigneur veut nous transformer,
veut nous purifier le cœur
pour que nous invoquions ensemble son Nom
et que nous Le servions d’un seul cœur (cf. So ).

Mais il faut descendre.
C’est en descendant que nous irons
à la rencontre du Seigneur qui vient.
C’est en laissant le Seigneur extirper de nous
l’orgueil et l’insolence,
et nous empêcher de nous pavaner
sur sa montagne sainte,
que nous Le rencontrerons face à face (cf. So).

« Je ne laisserai subsister au milieu de toi
qu’un peuple petit et pauvre
qui aura pour refuge le Nom du Seigneur » (So ).

N’est-ce pas ce que le Seigneur est en train de faire
en son Église d’occident, chez nous ?
N’est-ce pas ce que le Seigneur est en train de faire
dans nos Fraternités monastiques ?
N’est-ce pas ce que le Seigneur est en train de faire
en chacun de nous ?

Un peuple petit et pauvre.
Un peuple qui se laisse déranger par Dieu
quand Il vient, petit et pauvre.

*

Seigneur, Tu nous appelles pour travailler à ta vigne.
Tu nous as appelés souvent.
Nous avions répondu « oui », mais trop souvent,
nous avons en réalité, travaillé pour nous-mêmes.
Nous avons du mal à travailler pour Toi,
vraiment pour Toi.

Viens Toi-même nous apprendre à travailler pour Toi.
Viens en notre humanité,
conduis-nous sur le chemin de l’humilité
et de la pauvreté du cœur
et apprends-nous les gestes du vrai labeur pour Toi.
Amen.

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