sanct - smANNONCIATION DU SEIGNEUR, A
24H DE PRIÈRE POUR LE SEIGNEUR & CONFIRMATION DE RITA
Mgr Alain Faubert, évêque auxiliaire de Montréal
Is 7, 10-14 ; 8, 10 ; Ps 39 ; He 10, 4-10 ; Lc 1, 26-38
25 Mars 2017
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

La fête des « Me Voici »

Chers frères et sœurs, chère Rita, pour dire quelque chose du mystère de l’Annonciation qui nous réunit aujourd’hui, c’est certain qu’on ne manque pas de ressources doctrinales et théologiques… même si les mots nous manquent, même si nous tombons à genoux devant l’Incarnation du Verbe incréé de Dieu, par la puissance de l’Esprit Saint, dans le sein de la Vierge Marie, la parthenos, la jeune fille préfigurée par l’almah qu’a chanté le prophète Isaïe.

Oui, c’est une grande solennité du Seigneur que nous fêtons : fête où est arrivée notre dévotion pour Marie, la servante du Seigneur, fête où devrait sans doute être réveillée, si elle ne l’est pas déjà, notre foi trinitaire. Parce qu’aujourd’hui, le Père envoie le Fils et l’Esprit dans le monde. Oui, l’Esprit déjà à l’œuvre… le Fils et l’Esprit, les deux mains du Père. Inséparables.

Alors, chers amis, nous ne manquons pas de choses à dire… et pour les dire, nous ne manquons certainement pas de mots savants… mais il me semble que la liturgie nous propose une voie plus simple au cœur du mystère… comme un petit sentier de montagne à côté de l’autoroute, un sentier qui ne mène pas moins haut, mais qui le fait plus humblement.

Le petit sentier de la liturgie nous suggère des mots tout simples pour parler du mystère insondable de l’Annonciation, quelques mots, deux petits mots… mais, attention, ils sont puissants : « Me voici! »

Je vous propose, frères et sœurs, d’appeler désormais l’Annonciation la fête du « me voici ». Ou plutôt la fête des « Me voici », parce que vous aurez remarqué qu’il y en a plusieurs qui s’appellent et se répondent à travers les textes de la Parole d’aujourd’hui.

« Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté. » La voix du psalmiste… qui va être celle de Jésus qui entre dans le monde pour répondre à l’appel de son Père. « Voici la servante du Seigneur »… La voix de Marie qui manifeste par ces mots que, depuis toujours, son être entier est un « oui » total, une totale disponibilité à l’action du Seigneur.

Mais il y a un troisième « Me voici ». Peut-être moins apparent dans les textes, mais non moins présent. Un « me voici » qui, cette fois n’est pas adressé au Seigneur, mais par le Seigneur à l’humanité : « Me voici, dit le Seigneur : je suis Dieu avec vous, je suis Emmanuel. » C’est le plus beau « Me voici » qu’on puisse entendre. Dieu, en Jésus Christ, qui nous dit : « N’ayez pas peur, je suis là; je suis avec vous tous les jours. » Dieu, en Jésus Christ qui vient nous aider à dire à notre tour « Me voici », à le suivre dans la réponse d’amour que Jésus donne à son Père.

Et Marie qui accueille le message de l’Ange, Marie qui s’abandonne à la déroutante volonté de Dieu, Marie aussi comme une sœur, une mère, un modèle, une pédagogue, Marie est là pour nous apprendre le « Me voici » qui plait au Seigneur.

N’est-ce pas extraordinaire, ma chère Rita, qu’en cette solennité des « Me voici », tu sois au milieu de nous pour dire bientôt d’une voix forte : « Me voici »? Mais avant de t’avancer pour recevoir la confirmation qui te marque tout entière de l’Esprit Saint, le Don de Dieu, regarde donc avec nous quelques instants le mystère qui se découvre à nos yeux par ces deux petits mots… Oui, le « me voici » du Seigneur, il faut vraiment le contempler. Pour mieux le célébrer. Le « me voici » de Marie, il faut aussi le méditer, pour mieux le vivre à notre tour.

Remarquons d’abord que Dieu ne fait pas les choses à moitié. Ce n’est pas un « me voici » de convenance, un « je suis avec toi… mais j’ai tellement d’autres choses à faire, tu sais j’ai l’univers à faire tourner… quelques galaxies à créer. » Non, Dieu vient tout entier. Il s’engage et se compromet. Et nous n’en croyons pas nos yeux! Dieu ne nous sauve pas du haut du ciel. Il aurait pu le faire. Dieu ne vient pas à moitié sur nos routes… son incarnation l’amène à partager nos joies et nos peines, nos sueurs et nos douleurs.

Allons plus loin encore et disons que cette incarnation, cet abaissement est une kénose, un dépouillement. Un dépouillement qui va aller jusqu’à la mort et la mort sur la croix. Émerveillons-nous : Dieu n’a pas prévu de sortie de secours, du genre : « Me voici, mais si ça chauffe trop, j’aurai toujours ma baguette magique pour me rendre invisible et me défiler… » Dieu est allé au bout de l’amour pour nous. Pour moi, pour toi Rita. Oui, il faut le prendre personnel comme on dit. Comme saint Paul : « Le Christ m’a aimé et s’est livré pour moi. » Ou comme saint Pierre : « C’est pour nous tous que le Christ a souffert… »

Remarquons ensuite que son « Me voici », Jésus le dit en araméen et aussi en hébreu, à travers le psaume. Il accepte de dire un « Me voici » historiquement et culturellement situé, comme pour nous renvoyer à notre propre condition historique. Car notre « me voici », comme celui de Marie, correspond à un appel pour ici et maintenant, pour l’aujourd’hui de Dieu, pour ce lieu où nous avons à prendre racine pour porter du fruit.

Jésus est vraiment le Sauveur universel, et pourtant il accepte cette incarnation particulière, en ces temps anciens, au sein de ce peuple si original. Comme pour nous donner le signal qu’on ne peut pas sauver le monde en général, qu’on peut lui apporter le salut intégral qu’en allant le rejoindre dans toutes ses particularités, dans toutes ses singularités, dans l’unicité de chacune des personnes, uniques et irremplaçables qu’il a créées.

Et voilà que sous nos yeux, l’Annonciation devient une fête missionnaire! Elle l’est déjà par la mission du Fils et de l’Esprit que le Père envoie dans le monde. Elle l’est par la vocation de Marie qui va bientôt la lancer sur les routes de Judée pour rejoindre Élisabeth, sa cousine. Elle l’est par cet appel à notre propre réponse : « Me voici, Seigneur, envoie-moi. Envoie-moi comme le prophète Isaïe, aux hommes et aux femmes de notre temps, envoie-moi, Seigneur leur dire dans des mots et des gestes qu’ils pourront comprendre, combien tu les aimes et tu veux pour eux la vie pleine et bonne, la vie éternelle déjà commencée quand on se livre à ton Feu. »

Et te voilà donc, Rita, en cette fête missionnaire… Te voilà appelée par ton nom pour être remplie de l’Esprit du Seigneur. Pour que ta vie tout entière soit un « Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté! »

Souviens-toi de la kénose de Jésus, de son abaissement qui nous a ouvert le ciel. Souviens-toi de la disponibilité de Marie, de sa confiance en l’amour invincible du Seigneur pour elle, pour son peuple et pour tout le monde. « Me voici »… et tout devient possible, avec Lui.

Par le don spécial de l’Esprit Saint, tu es appelée désormais à faire de ta vie un témoignage rendu à l’Évangile. Ça peut faire peur… spécialement quand on est face à l’Injustice, au mensonge, à la violence du monde. Souviens-toi toujours que le Seigneur lutte à tes côtés.

Souviens-toi de la promesse qu’il nous fait par la bouche d’Isaïe : « Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole malfaisante, si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de midi. Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront vite. Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche. Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra; si tu cries, il dira : « Me voici. »

Amen.

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