FMJ MtlSAINT SACREMENT DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST – A
Frère Thomas
Dt 8, 2-3 . 14b-16a ; 1 Co 10, 16-17 ; Jn 6, 51-58
18 Juin 2017
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

L’adoration du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ

La fête du Saint Sacrement du corps et du sang du Christ
est associée à l’adoration du Saint Sacrement.
En effet Sainte Julienne du Mont Cornillon au 13è siècle,
qui est à l’origine de cette fête, a eu en vision
– outre un disque blanc avec une bande noire,
qui signifiait qu’il manquait une fête à l’Église – un ostensoir.
Nous pouvons le voir sur un des vitraux de notre église à votre droite.
Nous sommes ici au Sanctuaire du Saint Sacrement,
où l’adoration est au cœur de tout ce qui se vit ici.
Comment pouvons-nous comprendre et justifier l’adoration du Saint Sacrement ?

En effet si Jésus a donné le Sacrement de son corps et de son sang,
c’est d’abord pour que nous le mangions et le buvions.
Comment comprendre l’adoration,
qui n’est vécue ni chez les protestants ni chez les orthodoxes,
mais à laquelle nous catholiques nous tenons ?
Je m’inspirerai pour cela des raisons avancées par le frère Pierre-Marie,
fondateur de nos fraternités monastiques de Jérusalem,
dans notre revue Sources vives intitulée « Eucharistiques ».
Nous pouvons regarder à la lumière de l’Ecriture.
Nous pourrons nous mettre un peu à l’écoute de l’Histoire.
Et enfin nous pourrons considérer les raisons pastorales.

Si le Seigneur Jésus, dans l’eucharistie, se fait pain vivant descendu du ciel,
c’est pour que nous le mangions, que nous le buvions.
Mais à quoi servirait-il que sa chair soit la vraie nourriture et son sang la vraie boisson,
si ce n’est pas pour que nous l’adorions ?
À l’objection « l’eucharistie est faite pour être mangée et non regardée »,
le pape Benoit XVI, quand il était le cardinal Ratzinger, répondait :
« elle est faite pour être adorée. »
S’il y a communion, proximité entre l’homme et Dieu, il y a aussi distance.
Tout au long de l’Ecriture Sainte, nous voyons cette proximité et cette distance,
entre l’homme et Dieu.

Adam, avant la chute, parle familièrement avec Dieu ; ainsi que Noé.
Abraham accueille Dieu sous la forme de trois mystérieux personnages
qui viennent le visiter au chêne de Mambré.
Jacob a la vision en songe d’une échelle avec des anges
et il donne à ce lieu le nom de Bethel « Maison de Dieu ».
À Moïse, qui se tient souvent en présence du Seigneur,
Dieu commande de faire un tabernacle, une tente,
avec la présence permanente de Dieu au milieu de son peuple.
Dieu lui demande même de faire une arche sainte,
signifiant d’une manière toute particulière sa présence.
L’arche d’alliance accompagne le peuple d’Israël en Terre promise
et elle est gardée par les fils de Lévi.
À Salomon, Dieu demande de bâtir un Temple à Jérusalem pour abriter l’arche d’alliance.
Puis le Temple est détruit, l’arche est perdue.
Mais, après l’exil à Babylone, le Temple est reconstruit,
pour signifier une fois de plus la présence de Dieu au milieu de son peuple.
Nous voyons ainsi le peuple d’Israël, le peuple de la Première Alliance,
dans la Sainte Écriture, qui nous enseigne déjà à adorer Dieu,
qui signifie sa présence au milieu de nous.

Que dire alors de Jésus, qui est l’Emmanuel annoncé par le prophète :
« Dieu – avec – nous » !
Jésus fait la promesse à ses disciples,
avant son départ pour le Père, qu’il serait avec eux tous les jours,
jusqu’à la fin du monde.
N’est-ce pas dans l’eucharistie et spécialement dans l’adoration,
que nous voyons cette promesse de Jésus se réaliser ?

L’Histoire de l’Église nous enseigne la tradition de l’adoration.
Il y a eu dès les premiers siècles de l’Église,
la sainte réserve, pour apporter la communion
à ceux qui ne pouvaient pas participer à l’eucharistie.
À partir du 13è siècle apparaît en Occident l’ostensoir,
pour présenter à l’adoration des fidèles l’hostie consacrée.
Il y a l’épisode où sainte Claire fait rebrousser chemin à des pillards Sarrazins,
en brandissant l’ostensoir.
Cet épisode est représenté dans l’abside de cette Église.
Au 17è siècle la dévotion au Sacré cœur de Jésus va contribuer
à développer l’adoration du Saint Sacrement.
Et l’adoration deviendra réparatrice, face aux dommages causés par les péchés,
notamment avec la construction à Paris au 19è,
de la basilique du Sacré cœur de Montmartre,
où se vit l’adoration perpétuelle du Saint Sacrement.
Nous savons aussi la place que tenait le Saint Sacrement
dans la spiritualité du Bx Charles de Foucault,
qui voulait apporter ainsi la présence de Jésus au milieu des Touaregs.

Si donc l’adoration du Saint Sacrement a tout un enracinement scripturaire et historique,
quelles raisons pastorales pouvons-nous y voir pour la pratiquer dans nos églises ?
L’adoration – dit le cardinal Danneels – est un arrêt sur image
au moment de l’élévation de l’hostie par le prêtre à la messe.
Elle est même plus qu’une photo :
elle est l’eucharistie qui se trouve là,
présente dans une église, en dehors de la messe.
Pour ceux et celles qui ont suivi la messe,
elle en est le prolongement.
Pour ceux et celles qui vont suivre la messe, elle en est la préparation.
Pour ceux et celles qui, pour diverses raisons, ne vont pas à la messe,
elle est un accès à la messe.
Pour ceux et celles qui, pour diverses raisons,
n’ont pas accès à la communion sacramentelle,
elle permet d’une façon tangible (parce que visible)
une communion spirituelle.
Pour ceux et celles qui se sont salis le regard par toutes sortes d’images,
sur internet ou ailleurs, elle est un lieu privilégié de purification du regard,
extérieur ou intérieur.
L’adoration ne fait pas concurrence à la messe, elle y conduit.
Elle permet à une église ou à une chapelle d’être un lieu de recueillement.
Elle permet à une église de rester ouverte,
car elle requiert des adorateurs, donc du monde présent dans l’église.
Elle amène aussi vers le sacrement du pardon,
car elle amène à l’introspection et à l’examen de conscience.
Nous faisons l’expérience, ici au Sanctuaire du Saint Sacrement, comment adoration
et sacrement de réconciliation (qui est offert notamment l’après-midi) font bon ménage.

Oui l’adoration nous fait expérimenter, comme les Israélites au désert,
que « l’homme ne vit pas seulement de pain,
mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur. »
L’adoration nous adresse l’interpellation de Saint Paul :
« Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ ? »

Merci vous tous et toutes qui assurez régulièrement des heures d’adoration dans ce sanctuaire. Vous nous aidez à nous plonger dans l’Ecriture Sainte,
avec le peuple d’Israël devant la présence du Seigneur.
Vous nous aidez à nous plonger dans la tradition séculaire de l’Église du Christ.
Vous nous aider à davantage aimer et à mieux vivre l’eucharistie,
le Saint Sacrement du corps et du sang du Christ.

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