FMJ MtlSAINT SIMON ET SAINT JUDE, APÔTRES – B
Frère Antoine-Emmanuel
Ep 2, 19-22 ; Ps 18 ; Lc 6, 12-19
28 octobre 2009
Montréal, Sanctuaire du Saint-Sacrement

Con-citoyens des saints

Qu’elle est précieuse la parole de l’apôtre Paul
que nous venons d’entendre :
« Vous n’êtes plus des « Xenoi » ni des « Paroikoi »
vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage,
mais vous appartenez à la même cité que les saints ;
vous êtes con-citoyens des saints,
vous êtes de la maison de Dieu (cf. Ép 2,19).

Nous ne sommes pas des personnes seulement admises,
à peine acceptées dans la maison de Dieu,
dans la communauté chrétienne.
Tous, par le sang de Jésus et par notre Baptême,
nous sommes devenus membres à part entière
de la maison de Dieu.

Il n’y a pas dans l’Église de citoyens de seconde classe.
Il peut y avoir en nous des sentiments d’exclusion,
des blessures ou de la culpabilité
qui font que nous nous sentions
comme à part de la communauté,
un peu en dessous ou un peu au-dessus.
Mais la vérité est bien dans la Parole de Dieu :
Tu n’es ni un étranger,
ni un hôte de passage dans l’Église :
par ton Baptême, tu es con-citoyen des saints,
tu es à part entière de la maison de Dieu !
Quelle belle dignité !

***

Mais à quel titre
sommes-nous devenus membres
de la famille de Dieu ?
C’est la question que pouvaient se poser Simon et Jude.
La réponse leur appartenait et ne leur appartenait pas.
La réponse leur appartenait
parce qu’un jour, au petit matin,
ils ont été « appelés » et « choisis » par Jésus
qui leur donna le nom d’apôtres,
c’est-à-dire d’émissaires, d’ambassadeurs.
Il y a eu là quelque chose de tangible :
un regard de Jésus, sa voix, un geste peut-être,
qui manifestaient un choix.
« Ce n’est pas vous qui m’avez choisis,
mais c’est moi qui vous ai choisis » (Jn 15, 16).
Mais ce choix restera toujours mystérieux.

Que s’est-il passé cette nuit-là,
cette nuit que Jésus passa en prière.
Il y a dans leur appel un mystère caché,
obscur pour nous comme une nuit.
Un mystère de prière,
c’est-à-dire de dialogue et de communion
entre le Père et le Fils.
Notre appel, comme notre vie,
est né d’un au-delà pour nous inaccessible,
d’un excès d’amour si aveuglant
qu’il semble être une nuit.

C’est le mystère de l’appel de Dieu.
Mystère devant lequel on peut se rebeller,
ou bien où l’on entre dans le consentement et l’adoration.
Alors ce mystère nous accueille et nous transforme,
comme ont été transformés Simon ou Jude
devenus martyrs aux confins de la Mésopotamie !

*

Simon et Jude…
Les Évangélistes les nomment toujours
l’un à côté de l’autre.
Et pourtant, ils sont si différents !
Simon est appelé le « zélote »,
c’est-à-dire celui qui est zélé pour la loi ;
Il est aussi appelé le cananéen,
et le verbe qaná signifie « être jaloux, être passionné ».

Jude, en revanche est surnommé Thaddée
qui semble venir de l’araméen « taddá »
qui veut dire « poitrine ».
Jude est l’homme de la poitrine,
nous dirions un homme au grand cœur.
Jude est l’apôtre magnanime.
Il incarne la béatitude de la douceur.

Un apôtre zélé
sans doute jusqu’à en être pénible pour certains
et un apôtre débordant de bonté
sans doute jusqu’à en être insupportable pour d’autres…

C’est ainsi que Jésus tisse la communauté des disciples !
Chacun apporte quelque chose d’unique, de précieux.
La nature unique de chacun,
purifiée et transfigurée par la grâce unique
qui repose sur chacun
voilà ce que chacun offre à la communauté et à sa mission.

Si tu es Simon, sois Simon, et réjouis-toi d’être Simon.
N’attends pas que tous les autres soient des Simon.
et rends grâce pour Thaddée qui est si différent de toi.

Et si tu es Thaddée, n’aie pas peur d’être Thaddée,
mais désire que Simon à côté de toi
soit aussi pleinement ce qu’il est !

La beauté et la fécondité de la communauté
ne viennent pas de Simon tout seul,
ni de Thaddée tout seul.
Elles viennent de Simon et Thaddée ensemble
dans la mesure où ils vivent de Jésus,
où ils puisent la vie en Jésus !

*

Pleinement membres de la maison de Dieu
par un choix de Dieu qui demeure un mystère d’Amour
et contribuant à la communauté
de manière unique et irremplaçable…
Tout cela, frères et sœurs,
l’Eucharistie nous y replonge
avec une force extraordinaire ;
l’Eucharistie « fait » l’Église.
Elle la « fait » ce soir si nous nous laissons faire.
Si nous nous laissons aimer,
si nous nous laissons choisir,
si nous nous laissons donner à la communauté.

© FMJ – Tous droits réservés.