sanct - sm33e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
P. Marcel Dumont, o.p.
Ml 3, 19-20 ; Ps 97 ; 2 Th 3, 7-12 ; Lc 21, 5-19
17 novembre 2013
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Réalité de la Présence divine

Un évangile bien difficile, je le concède avec vous. Je dois avouer qu’il fait même trembler les prédicateurs. C’est que l’évangéliste Luc écrit, dans une vision prophétique, sur trois dimensions à la fois : sur le présent des disciples ; sur le proche et éloigné présent de l’Église ; et, sur le présent actuel qui est le nôtre.
Mais, d’abord, pour entrer dans l’intelligence de ce 33e dimanche du Temps ordinaire, il est bon de se situer dans la perspective du Temps liturgique : nous sommes à l’avant dernière semaine de l’Année, dite, liturgique. Dimanche prochain, ce sera la grande fête du Christ Roi de l’univers qui, comme nous le savons, est le sommet de l’Année liturgique pour l’Église. Et, l’Église nous propose de méditer sur des textes qui nous parlent des choses de la fin. Mais, bien sûr, non pas n’importe quelle fin : celle de ce monde ; celle de la fin du règne du mal qui conduit à la victoire ; celle de comprendre, aussi, que la présence de Jésus est dans tout ce que nous avons à vivre, à traverser. Il ne nous laisse jamais seul.
Ce sera l’image du Temple, dans l’Évangile, qui nous aidera à comprendre le mystère de la Présence de Dieu dans tout ce combat.

Le Temple, donc, dans ce texte, symbolise à la fois trois réalités : celle du Temple de Jérusalem ; celle du Christ Jésus, Temple de la présence de Dieu parmi nous ; et, enfin, celle de l’Église, que nous formons en devenant Temple de l’Esprit. C’est donc l’idée du Temple, présence de l’activité de Dieu au milieu de son peuple, qui va nous guider.

Nul n’était plus conscient que Jésus de la réalité spirituelle du Temple : la réalité de la Présence divine. Dieu parmi nous, à l’oeuvre par sa propre présence. Une véritable réalité, connaissance pour les Israélites dans leur imaginaire et leur quotidien religieux. Mais une réalité qui prendra toute sa force lorsque l’Église naissante comprendra que le Corps du Christ est le lieu de résidence permanent de l’Esprit de Dieu : Son corps est Temple de Dieu.

Donc, le Temple de Jérusalem, disons-nous, symbole religieux et politiques du peuple d’Israël. Le Temple est le centre névralgique du peuple Hébreux, il structure toute son identité, sa personne, il est sa façon d’être devant Dieu, d’être avec Dieu. Réalité à laquelle Jésus, d’ailleurs, s’identifie lui-même en tant qu’israélite. Mais, il y plus encore, comme nous venons de le signaler, il y a le temple qui est le Christ Lui-même, en tant que Fils de Dieu, en tant que Présence de Dieu venu tout récapituler en sa chair, en ce Temple charnel. Et sa chair, ne peut se séparer de l’Église, son épouse : nous sommes tous appelés à être membre de son corps, Temple de l’Esprit !

Donc, trois réalités, dans cet Évangile, qui convergent en une seule : le Temple qui est présence de Dieu.

Certains disciples de Jésus parlaient du Temple [nous dit l’Évangile], admirant la beauté des pierres et les dons des fidèles. (Lc 21,5) C’est donc, d’abord, le Temple de Jérusalem dont il est question : « Ce que vous contemplez [dit Jésus à ses disciples], des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit » (6). Il prophétisait la destruction du Temple de Jérusalem en l’an 70 par les romains. Et, pour les disciples, c’était terrible de prophétiser la destruction du Temple, car, Jésus prophétisait, en quelque sorte, le retrait de Dieu, le retrait de sa présence parmi son peuple. « Maître, quand cela arrivera-t-il, et quel sera le signe que cela va se réaliser ? » (7)

Ici, nous avons une nette progression dans l’idée du Temple. Lorsque l’évangéliste Luc parle de « signe », il ne parle plus du Temple de Jérusalem, il parle d’une présence autre, celle du Maître…, « du signe de la présence » du Christ parmi nous ! « … et quel sera le signe que cela va se réaliser ? » Ainsi, Jésus ne prophétisait pas seulement sur le Temple d’Israël ? Il voulait signaler, aussi, le temple de son corps qui devait être détruit au point qu’on n’y reconnaisse plus la pierre de faîte, la pierre angulaire qui devait structurer le Temple de l’Église. Au moment de sa passion, sa chair fut a-t-elle point broyée qu’on avait peine à reconnaître un visage d’homme… Nous avons, ici, l’image principale du Temple en la personne de Jésus, pour ce qui est du combat final : sa chair livrée pour le combat de la fin. Puis, Jésus, dans l’Évangile, se mettra à énumérer les événements pour le combat à venir en s’incluant Lui-même à l’intérieur de l’histoire, l’histoire de l’Église et des événements du monde : « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront en mon Nom en disant : ‘C’est moi’ » (8). Et, voici que la pédagogie eschatologique, dite de la fin, dans l’Évangile, n’est pas terminée.

Voilà, que l’Église, Temple avec le Christ, est incluse elle-même dans ce mystère eschatologique : « Mais avant tout cela, on portera la main sur vous et on vous persécutera ; on vous livrera aux synagogues, on vous jettera en prison… » (12) Le combat de la fin n’est donc pas seulement pour le Christ, mais il est aussi pour nous, nous avec Lui. Que retenir, de cet Évangile à trois dimensions, pour ce 33ème dimanche du Temps Ordinaire qui est le nôtre, pour la réalité de la Présence de Dieu qui est la nôtre ?

La destruction du Temple de Jérusalem, certes, a, bel et bien, eu lieu dans le temps. Cette destruction annonçait une nouvelle ère, celle du Christ dans le temps et l’histoire. Désormais, la Présence de Dieu allait se concrétiser en son corps, en sa chair. Et, son épouse, l’Église, nous, les membres de son Corps, n’allait pas être exempte de la réalité mystique de l’Esprit de Dieu vivant en la chair : Dieu vient habiter en nous.
Cependant, cette épouse se doit de communier pleinement à l’oeuvre de l’Époux : il y a un combat à mener et à compléter.

Devons-nous nous surprendre si nous avons à nous battre dans notre foi ! Quant sera la fin, nul ne le sait. Ce que nous savons, c’est que la victoire est assurée… Cependant, il nous faut persévérer, nous dit l’Évangile : « C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie. » (19) Que ce dimanche nous prépare à la venue de Celui qui vient, le Christ, Roi de l’univers!

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