FMJ MtlQUATRIÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE, A
Frère Jakub
So 2,3 – 3,12-13 ; Ps 146 ; 1 Co 1,26-31 ; Mt 5, 1-12
29 Janvier 2017
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Garder la Parole comme un pauvre

« Miracle des miracles, mon enfant, mystère des mystères.
Parce que Jésus-Christ est devenu notre frère charnel.
Parce qu’il a prononcé temporellement
Et charnellement les paroles éternelles.
In monte, sur la montagne,
C’est à nous, infirmes, qu’il a été donné,
C’est de nous qu’il dépend, infirmes et charnels,
De faire vivre et de nourrir
Et de garder vivantes dans le temps
Ces paroles prononcées vivantes dans le temps.
Mystère des mystères, ce privilège nous a été donné,
Ce privilège incroyable, exorbitant,
De conserver vivantes les paroles de vie,
De nourrir de notre sang, de notre chair, de notre cœur
Des paroles qui sans nous retomberaient décharnées.
D’assurer, (c’est incroyable), d’assurer aux paroles éternelles.
Ainsi les paroles de Jésus, les paroles éternelles sont
Les nourrissonnes, les vivantes nourrissonnes
de notre sang et de notre cœur
De nous qui vivons dans le temps. »

Chers frères et sœurs,

Ces paroles de Charles Peguy que j’aime beaucoup, comme vous savez déjà
peuvent nous conduire dans notre méditation.
Garder la Parole de Jésus;
ne pas la laisser disparaître,
ne pas la laisser s’effacer de notre mémoire,
de notre esprit, de notre cœur;
la garder précieusement.
C’est le trésor caché, c’est la perle précieuse.
C’est à nous, les pauvres, qu’Il a donné la Parole de Vie.

Toute la tradition prophétique, enseigne que Dieu
est le défenseur attiré des pauvres et des petits.
Mais depuis Sophonie, la pauvreté ne caractérise plus
seulement un état social.
Elle évoque le fond même de l’expérience religieuse.
Attitude de disponibilité, d’accueil et de désir,
ouverture au don de Dieu,
cette pauvreté libère et épanouit.
Alors heureux sont ceux qui savent encore s’émerveiller
et se réjouir comme un enfant qui reçoit un cadeau !

Et jésus nous apprend comment poser sur les autres
et sur nous-mêmes un autre regard.
Il nous fait regarder toutes choses avec les yeux de Dieu lui-même
et il nous apprend à nous émerveiller,
il nous dit la présence du Royaume là où nous ne l’attendions pas :
la pauvreté du cœur, la douceur, les larmes la faim
et la soif de justice, la persécution …
Heureux ceux qui ont le cœur désencombré,
ceux qui ne sont pas prisonniers de leur suffisance :
eux seuls sont en mesure de faire place à Dieu dans leur vie !
Et la première démarche consiste selon Sophonie,
en une remise totale au Seigneur.
Les pauvres auront pour refuge le Nom du Seigneur,
à jamais solidaire de son peuple pour le meilleur et pour le pire.

De cette proximité avec le Seigneur, tout découle.
D’abord les exigences morales.
Les pauvres ne commettront plus de crimes,
ne proféreront plus de mensonges.
Au terme, cette harmonie des cœurs engendrera la paix,
celle du troupeau qui paît en toute sécurité.

Et quand le Fils de Dieu s’est fait homme,
il a choisi la voie de la pauvreté, du dépouillement.
Jésus est Dieu qui se dépouille de sa gloire.
Pauvre en grec n’a pas seulement une signification matérielle,
mais veut dire aussi « mendiant »
comme a bien su le voir sainte Thérèse de l’Enfant Jésus :
dans son Incarnation, Jésus se présente comme un mendiant,
un nécessiteux en quête d’amour.
Dans le début de lettre aux Corinthiens, Paul avait dit :
« Je rends grâce à Dieu sans cesse à votre sujet,
pour la grâce de Dieu qui vous a été donnée dans le Christ Jésus.
Car vous avez été, en lui, comblés de toutes les richesses,
toutes celles de la parole et toutes celles de la connaissance.
C’est que le témoignage du Christ s’est affermi en vous,
si bien qu’il ne vous manque aucun don… ».
On voit bien que pour Paul, cette connaissance de Dieu
qui nous a été donnée par grâce
ne doit pas être une occasion de nous vanter :
ce serait justement contraire à la sagesse !
Les dons de Dieu ne sont pas une cause d’orgueil personnel,
mais d’action de grâce !
Miracle des miracles,
notre faiblesse devient la matière première du Règne de Dieu.
Nous les pauvres, Dieu nous comble de sa richesse et de ses dons.
Dieu s’est plu à appeler, ce qu’il y a de fou, de faible,
d’origine modeste, ce qui est faible, pour en faire de la Sainteté
Dieu transforme la nuit en lumière.

La joie jaillit d’un cœur pauvre, qui sait exulter et s’émerveiller
pour les œuvres de Dieu, comme le cœur de la Vierge,
que toutes les générations appellent « bienheureuse ».
Mère des pauvres, Elle nous aide à vivre l’Évangile,
à incarner les Béatitudes dans notre vie,
et à avoir le courage du bonheur.

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