Présentation du Seigneur au Temple
Frère Bradford
Ml 3, 1-4 ; Ps 23 (24) ; He 2, 14-18 ; Lc 2, 22-40
2 février 2025
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal
La Présentation au Temple :
Quand les Yeux de l’Espérance Voient le Salut
Frères et sœurs,
La fête que nous célébrons aujourd’hui, la Présentation de Jésus au Temple, nous invite à contempler un événement crucial dans l’histoire du salut, un passage qui fait écho aux contrastes de l’Incarnation elle-même.
Au début, souvenons-nous de la nuit de Noël à Bethléhem, au cœur de la nuit. Les cieux se sont ouverts, une troupe d’anges est apparue dans la gloire du Seigneur à quelques bergers. Ces bergers étaient tout en bas de l’échelle sociale de l’époque. Ils n’étaient pas propriétaires de leurs troupeaux, ils étaient les ouvriers les plus pauvres. On s’en méfiait, ils ne faisaient pas bonne impression. Pourtant, c’est à eux d’abord que la naissance du sauveur est annoncée, et ils sont les premiers à le voir. Et que voient-ils ? Un nouveau-né pauvre, couché dans une mangeoire, la dernière place de leur monde agricole. C’était le début du temps de Noël.
Aujourd’hui, à la fin de ce cycle, nous sommes à Jérusalem, en plein jour, dans le Temple. Le Temple est rempli de beaucoup de monde. Il y a les prêtres et les lévites, préoccupés par les rituels, les pèlerins venus d’un peu partout, les marchands d’animaux pour les sacrifices, les changeurs d’argent, des gens qui prient. Il faut imaginer tout ce monde affairé. Et dans ce Temple, rempli de tant de gens occupés par la religion, qui remarque l’arrivée de ce jeune couple de province portant un enfant de six semaines et l’offrande des pauvres, deux petites colombes ? Qui voit ça ?
Et pourtant, c’est ainsi que s’accomplit la prophétie des prophètes concernant la rencontre grandiose entre Dieu et son peuple à la fin des temps. Nous l’avons entendu dans la première lecture : « Soudain viendra dans son Temple le Seigneur que vous cherchez, le messager de l’alliance que vous désirez. Le voici qui vient. Qui pourra soutenir le jour de sa venue ? Qui pourra rester debout lorsqu’il se montrera ?« . Cette prophétie se réalise par l’entrée de cet enfant de six semaines dans le Temple.
Marie et Joseph, bien sûr, sont tellement humbles. Ils ignorent la grandeur de leur geste. Ils viennent simplement accomplir la loi, présenter leur fils premier-né pour qu’il soit racheté par les deux colombes. Toutes les familles pieuses, même les plus pauvres, font la même chose. Mais derrière cette loi de la présentation du garçon premier-né, il y a un grand mystère, car dès l’Exode en Israël, les premiers-nés, garçons et animaux, sont consacrés à Dieu en souvenir de la mort des premiers-nés en Égypte. Ces premiers-nés dont la mort fut le prix de la libération des Hébreux de l’esclavage. Les garçons premier-nés consacrés sont présentés au Seigneur, puis rachetés par un sacrifice. Il y a là de très grands horizons par rapport à Jésus.
Mais dans la foule du Temple, personne, ou presque, ne prête attention à Marie, Joseph et au petit enfant. Personne ! Sauf deux vieillards. J’aime imaginer qu’ils sont un peu oubliés, laissés pour compte. Sans doute viennent-ils si souvent dans le Temple depuis si longtemps que personne ne fait plus attention à eux. Ils sont devenus invisibles. Ce sont Siméon et Anne. Siméon n’est pas prêtre, ce n’est pas dit dans le texte. C’est un homme pieux qui aime prier dans le Temple. En fait, il n’y a pas de prêtre présent dans cette page, sauf bien sûr ce petit enfant. C’est lui qui va devenir, selon l’expression de la deuxième lecture, le prêtre, le grand prêtre miséricordieux et digne de foi, afin d’enlever les péchés du peuple. C’est cet enfant de six semaines qui est le vrai grand prêtre éternel, et qui entre aujourd’hui dans le Temple pour la première fois dans les bras de sa mère.
Je pense que Siméon et Anne sont aussi pauvres que les bergers. Pauvres, surtout parce qu’ils approchent de la fin de leur vie, les mains vides. Tout le monde est désemparé devant la mort. Ils ont les mains vides, mais il leur reste une chose à tous les deux : c’est l’espérance. Siméon a l’espérance de voir de ses yeux l’accomplissement des promesses de Dieu pour son peuple. Sans doute Siméon et Anne ne savent pas quel prix ils ont aux yeux de Dieu. Au milieu de tous ces gens affairés par la religion, eux ont délaissé cet affairisme pour vivre uniquement de leur foi et de leur espérance en Dieu. Et donc ce jour-là, eux seuls ont des yeux pour voir la grandeur de Dieu dans ce petit enfant. Siméon dit : « Mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples, lumière qui se révèle aux nations, gloire de ton peuple Israël« . Personne d’autre n’a vu ce que Siméon et Anne ont vu ce jour-là dans le Temple : la gloire de Dieu.
Alors, que Dieu par son Esprit Saint ouvre nos yeux à nous aussi pour pouvoir voir avec quelle humilité, quelle petitesse, notre sauveur vient à notre rencontre, lui qui est notre lumière et notre libération.
Amen.