Baptême du Seigneur – C
Frère Pierre-Benoît
Is 40, 1-5.9-11 ; Ps 103 (104) ; Tt 2, 11-14 ; Lc 3, 15-16.21-22
12 janvier 2025
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal
L’Icône du Baptême du Christ :
Dans l’Eau, sur la Terre et sous le Ciel
Frères et sœurs baptisés, nous allons aujourd’hui faire du dessin. Je vous propose qu’ensemble, en imagination, dans la grâce de l’Esprit, nous dessinions l’icône du baptême du Christ. L’icône, cette représentation symbolique d’un mystère qui est là pour nous réjouir et qui est l’objet de cette fête aujourd’hui, le Baptême du Seigneur.
Dans ce dessin, nous allons nous laisser inspirer par les Écritures de l’eau, de la terre et du ciel. Il y aura Jésus, le peuple chrétien en espérance et la colombe de l’Esprit qui diffuse la grâce divine de l’eau, de la terre et du ciel.
Dans l’eau d’abord. Jésus est au milieu, debout, sur l’icône, dans le Jourdain. Pour reprendre ce que l’Écriture nous dit aujourd’hui, dans l’eau, Jésus, le Fils bien-aimé, est manifesté à nous. L’eau, dans la symbolique ancienne, a une double signification : menace et grâce. L’eau peut symboliser la mort. Souvenons-nous, la fin du monde antique « géographique » se perdait dans les eaux au-delà de la terre ferme et les navires risquaient d’y chuter, dans le néant. Dans l’icône de la Nativité de Novgorod, le fleuve Jourdain est d’ailleurs représenté plutôt comme une grotte, une grotte qui rappelle celle du tombeau où Jésus mort sera enseveli. Or, voici baptiser la bonne nouvelle : Jésus traverse ces eaux qui menacent et par sa grâce il les régénère et nous avec, baptisés. Il se tient debout, Jésus, au milieu des eaux. Sur une autre icône copte cette fois-ci, il y a même quatre petits poissons rouges qui sont dressés debout pour dire que cette régénération est pour toute la création en attente. Alors, voilà la bonne nouvelle pour nous qui nous relevons par les eaux du baptême. C’est ce que dit la lettre aux Romains : « Si par le baptême qui nous unit à la mort du Christ, nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme lui le Christ qui par la toute puissance du Père est ressuscité, c’est-à-dire relevé d’entre les morts ».
Au milieu de l’eau du Jourdain, le ciel s’ouvrit. L’Esprit sous la forme d’une colombe descendit sur Jésus. Une voix venant du ciel lui dit : « Toi, tu es mon fils bien-aimé. En toi, je trouve ma joie ». Voilà la scène donc au milieu de l’eau. Et nous aussi, nous sommes destinataires de cette parole : « Tu es mon enfant bien-aimé. En toi, je trouve ma joie ».
Alors, passons maintenant pour avancer des eaux à la terre. Sur l’icône, la terre est assez rocailleuse, avec des escarpements, des montagnes pointues. Jean-Baptiste se penche vers Jésus depuis la rive du Jourdain et il est avec des anges. Nous pouvons voir ici comme une prémisse du peuple chrétien sur la terre. Saint Grégoire de Nazianze nous dit que Jésus remonte de l’eau entraînant et élevant le monde avec lui. Élever le monde par la grâce du baptême. C’est l’appel de la lettre à Tite : Jésus s’est donné pour nous, pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien. Voilà notre vocation de baptisés. Heureusement, cette terre, elle est irriguée par les eaux du fleuve Jourdain. Elle est irriguée par les eaux du côté du Christ ouvert, ressuscité. Elle est irriguée par l’Esprit nous-même. C’est notre vocation, frères et sœurs chrétiens, frères et sœurs baptisés. Par notre baptême, nous sommes appelés à abreuver le monde buvant à la source de l’eau vive de notre sauveur. Nous sommes convoqués pour consoler le peuple, pour parler au cœur, pour porter la bonne nouvelle au monde en proclamant par notre vie inspirée par l’Esprit : « Voici votre Dieu, il vient avec votre puissance. Rassurez-vous en sa présence ». Cela nous demande la grâce du baptême. Cela nous demande donc la grâce de la conversion. Se convertir à l’Esprit. Il s’agit d’apprendre, comme dit Tite, à renoncer à l’impiété, à renoncer aux convoitises de ce monde et à vivre dans le temps présent, au milieu des escarpements, de manière raisonnable, avec justice et piété. Sur la terre, nous avons la grâce, c’est-à-dire nous sommes capables, rendus capables d’être ce peuple de chrétiens ardent à faire le bien.
Et voilà la perspective qui nous permet de le faire, c’est que nous sommes sous ce ciel dont nous attendons que se réalise la bienheureuse espérance. Nous voici, frères et sœurs, déjà passés de la terre jusqu’au ciel. Troisième partie de notre dessin. Grégoire de Nazianze toujours nous accompagne en disant que nous sommes comme de petites lumières autour du Christ, lui la grande lumière, reflétant sur nos traits la splendeur céleste. Il s’agit, frères et sœurs, que nous marchions sur la terre le visage « enciellé », le visage éclairé par la grâce divine. Nous sommes sur la terre comme citoyens des cieux. Voilà notre appel. Et pour cela, il s’agit de vivre à l’Esprit. Vivre connecté à l’Esprit de Dieu. Dans le ciel, la colombe est là qui nous protège et nous inspire et qui nous donne de vivre déjà de cette bienheureuse espérance. Vivre connecté à cet esprit qui par grâce nous est donné le jour de notre baptême, qui nous est redonné dans chaque eucharistie, qui nous est donné pour que nous vivions dans ce dessin du Père que nous dessinons pour conclure avec joie et bien, à travers notre vie, à la fois l’eau, la terre, le ciel.
Frères et sœurs baptisés, Alléluia. Amen.
