6ème Dimanche de Pâques – C
Frère Pierre-Benoît
Ac 15, 1-2.22-29 ; Ps 67 (68) ; Ap 21, 10-14.22-23 ; Jn 14, 23-29
25 mai 2025
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal
La Paix selon Dieu : Au-delà des Illusions du Monde
« Je vous laisse la paix. Je vous donne ma paix », nous dit le Seigneur ce dimanche dans sa bonne nouvelle (Jean 14:27). Et il ajoute : « Ce n’est pas à la manière du monde que je vous donne cette paix, ma paix » (Jean 14:27). Alors, frères et sœurs rassemblés, demandons-nous quelle est cette manière de Jésus de donner sa paix et, à contrario, quelle est cette manière différente, la manière du monde de penser la paix. Et ainsi, nous pourrons nous positionner pour accomplir notre appel d’être baptisé, croyant, artisan de paix.
Alors, commençons par les fausses paix, ce qui n’est pas la paix à la manière de Jésus. Il y a des moyens d’obtenir la paix qui ne sont pas ce que l’Évangile nous préconise. Quatre manières par exemple : tenir la paix par l’oppression, par la résignation, par l’indifférence ou par une sorte d’équilibrisme, nous allons y revenir.
Obtenir la paix par l’oppression, ce n’est pas la manière de Dieu. On ne peut pas forcer à la paix. Il y a eu dans l’histoire biblique, dans l’histoire du monde, des tyrans et encore possiblement dans l’histoire actuelle, des tyrans qui forcent la paix, despotes qui déclarent que c’est la paix dans leur pays, car de fait, ils ont supprimé ceux qui voulaient dialoguer avec lui, supprimé par soit des paroles qui font l’anathème ou des prisons, des camps de concentration qui enferment. Non, on ne peut pas forcer à la paix. La paix selon Dieu est un enjeu d’alliance. Cela implique donc un dialogue. Et dans ce dialogue, la justice sociale que prône l’Évangile demande de promouvoir la voix du plus petit. On est loin de l’oppression. « Justice et paix s’embrasse » (Psaume 85:10).
Si on ne peut pas obtenir la paix par l’oppression, on n’est pas non plus invité à gagner la paix par résignation. Vous connaissez l’expression « acheter la paix à bon prix » ? Non. Quand Jésus dans cet évangile nous fait ce souhait de la paix, il s’agit là du shalom. Le shalom qu’on entend aussi dans le nom de la ville sainte Yérouim (Jérusalem). Le shalom qui nous parle d’une abondance dans la vie, d’un accomplissement selon le cœur de Dieu. Ainsi donc sont appelés là des relations justes avec Dieu, des relations justes entre les personnes. Dieu a donné aux hommes et aux femmes de notre humanité la même origine. Il leur donne la capacité de former une même famille dans la paix en étant uni dans un esprit de fraternité.
Alors la fraternité nous amène au troisième point : l’indifférence. La paix ne peut pas être fruit de l’indifférence. Vous connaissez l’expression « Laisse-moi en paix ». On en conviendra, c’est une fausse paix. Au contraire de l’indifférence, la paix requiert l’attention à l’autre, la reconnaissance de sa spécificité, le choix de sa différence avec discernement.
Quatrième fausse paix que dénonce cette fois-ci la première lecture. Avec cette situation d’un conflit à résoudre, il ne s’agit pas de trouver la paix par une sorte d’équilibrisme selon Dieu. L’équilibrisme, on le voit d’une certaine manière dans une façon que comme homme nous utilisons dans l’équilibre des forces. Vous connaissez ce principe de la dissuasion nucléaire par exemple. Mais nous nous rendons bien compte que ce n’est pas le vrai chemin final de la Concorde. La concorde ne peut pas s’obtenir par la peur de la puissance de l’autre. Non, frères et sœurs, la Concorde se rejoint par l’union pas à pas des cœurs.
Alors si la paix ne s’obtient ni par l’oppression, ni par la résignation, ni par l’indifférence, ni par cette sorte d’équilibrisme, la paix selon Dieu, qu’en est-il de notre appel pour marcher comme artisan de paix dans la paix selon Dieu ? « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jean 14:27). Ce qui frappe, frères et sœurs, c’est que la paix est un don – « je vous donne » – un don de Dieu – « je vous donne ma paix » (Jean 14:27). Un don de Dieu à recevoir dans notre acte de foi. Il s’agit donc là, et c’est peut-être pour ça que nous sommes venus ce dimanche, il s’agit ici d’être dans les dispositions favorables pour accueillir en notre humanité ce don que Dieu nous fait avec abondance. Il nous s’agit de ne pas penser à la manière du monde mais à partir de Dieu.
Alors qu’en est-il ? Cela implique une disposition du cœur. D’abord d’entrer dans la conversion du cœur pour le disposer selon Dieu. Et voilà que l’Esprit Saint vient à notre secours. La paix dans ce cas est un fruit de l’Esprit (Galates 5:22). C’est ce que dans l’héritage de cette parole vivante, le Seigneur Jésus affirme aujourd’hui. Ensuite, le cœur tourné vers Dieu, il s’agit de le garder vers Dieu. C’est la garde du cœur. Garder mon cœur des paroles mauvaises, des regards non chastes, des pensées qui en silence détruisent. Et enfin le fruit, c’est la paix du cœur. Car la vraie paix commence au fond des cœurs. Ainsi donc : conversion du cœur, garde du cœur, paix du cœur.
En cela, frères et sœurs, le Seigneur nous invite à cultiver un esprit de contemplation, d’adoration véritable. En cela, Seigneur, tu nous donnes ce sanctuaire d’adoration pour te contempler dans le signe de la paix que tu fais en te donnant toi-même. Ici même nous adorons le corps de Jésus offert pour la rémission de nos péchés dans l’adoration eucharistique. Ici même nous communions au corps et au sang offert pour la rémission des péchés. Par lui, le Père a voulu réconcilier tout l’univers avec lui en faisant la paix par le sang de sa croix (Colossiens 1:20), comme l’affirme la lettre aux Colossiens. Ainsi donc, ici même nous contemplons Jésus qui s’offre, désarmé par amour, vulnérable pour notre vie. Oui, nous adorons le prince de la paix en tant qu’artisan de paix.
« Heureux Les artisans de paix, ils seront appelés fils et fille de Dieu » (Matthieu 5:9). C’est la 7ème béatitude.
« Je vous laisse la paix. Je vous donne ma paix » (Jean 14:27). Ce souhait de la paix est dans les dernières paroles de Jésus alors qu’il livre ce testament spirituel, allant avant d’aller vers sa passion volontaire montée jusqu’à la croix.
« La paix soit avec vous » (Luc 24:36, Jean 20:19, 20:21, 20:26). C’est dans les premières paroles après l’épisode de la croix dans l’apparition de Jésus ressuscité. « Que la paix soit avec vous ». Cela a été la première parole de notre nouveau pasteur, le pape Léon. St Il y a quelques jours, souvenez-vous quand il est apparu après la fumée blanche sur la loggia là-bas à Saint-Pierre le 8 mai, il disait ces paroles que nous pouvons reprendre comme une forme de prière, comme un souhait apporté dans notre adoration, dans notre communion comme disciple missionnaire croyant. Le pape François, le pape Léon disait : « Que la paix soit avec vous tous. Très chers frères et sœurs, telle est la première salutation du Christ ressuscité, le bon pasteur qui a donné sa vie pour le troupeau de Dieu. » Il continue : « Moi aussi, je voudrais que ce salut de paix entre dans votre cœur, atteigne vos familles, toutes les personnes où qu’elles se trouvent, tous les peuples, toute la terre. »
« Que la paix soit avec vous » (Luc 24:36, Jean 20:19, 20:21, 20:26). C’est la paix du Christ ressuscité, dit-il. Une paix désarmée et désarmante, humble et persévérante. Elle vient de Dieu. Dieu qui nous aime tous inconditionnellement.
Ainsi donc, frères et sœurs, artisans de paix, ensemble prions Marie, notre de la paix, prie pour nous. Amen. Alléluia. Amen.