FMJ Mtl2ème Dimanche de Carême – C
Frère Bradford
Gn 15, 5-12.17-18 ; Ps 26 (27) ; Ph 3, 17-4, 1 ; Lc 9, 28b-36
16 mars 2025
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal

Du Désert à la Gloire
Notre Chemin Pascal avec le Christ

 

En ce deuxième dimanche du Carême, l’Église, forte d’une tradition vieille de plus de mille ans, nous invite à contempler deux moments cruciaux de la vie de notre Seigneur Jésus-Christ : sa tentation au désert, que nous méditions dimanche dernier, et aujourd’hui, sa transfiguration glorieuse sur la montagne. Ces deux scènes, apparemment opposées, sont en réalité les deux faces indissociables du mystère pascal du Christ, le mystère de sa passion et de sa résurrection, de la croix et de la gloire. Elles nous révèlent comment Dieu, dans son amour infini, s’est lié à nous et à toute l’humanité pour nous sauver à travers la faiblesse et la gloire.

Saint Paul nous le rappelle dans la lettre aux Hébreux : le Christ a été tenté et éprouvé en toutes choses comme nous. Il a choisi de devenir en tout semblable à ses frères afin d’être ce grand prêtre miséricordieux dans notre rapport avec Dieu. Ayant lui-même souffert par l’épreuve, il est capable de venir en aide à ceux qui traversent les mêmes épreuves. Ce seul mot, dans le Nouveau Testament, que nous traduisons parfois par tenter ou éprouver, nous dit l’intime solidarité de Jésus avec notre condition humaine.

Et voici qu’aujourd’hui, la deuxième lecture, tirée de saint Paul, nous ouvre une perspective d’une espérance inouïe : nos corps sont destinés à être glorifiés à l’image du corps glorieux du Christ. Nous avons entendu que le Seigneur Jésus-Christ transformera nos pauvres corps à l’image de son corps de gloire. Ainsi, ces deux extrêmes de ce temps de Carême, l’abaissement dans l’épreuve et la transfiguration dans la gloire, résument en vérité notre propre histoire, l’histoire de chacun et de chacune d’entre nous. Elles racontent aussi l’histoire de toute l’humanité, de la chute d’Adam et Ève à notre relèvement en Jésus-Christ qui, en prenant sur lui nos faiblesses, notre pauvreté, nos faiblesses morales et physiques, les transfigure par sa vie divine. Il est devenu en tout notre frère pour que nous devenions, comme lui, fils et filles de son Père. C’est l’histoire du projet de Dieu pour l’humanité et pour chacun de nous.

Mais ces deux dimanches nous rappellent également l’histoire d’Israël, le peuple élu. Dimanche dernier, la tentation de Jésus au désert résonnait étrangement avec les tentations qu’Israël a connues pendant sa traversée du désert, son chemin vers la terre promise après sa libération de l’esclavage en Égypte. Israël a été éprouvé, tenté, et la manière dont le diable tente Jésus reprend ces mêmes thèmes. Ainsi, Jésus au désert revit en quelque sorte les épreuves d’Israël au désert.

Aujourd’hui, la transfiguration, particulièrement dans le récit de l’évangéliste Luc que nous lisons cette année, est remplie de rappels d’un autre aspect de cette traversée du désert par Israël : la rencontre décisive avec Dieu au Mont Sinaï. Nous y retrouvons la même nuée lumineuse, ce signe visible de la présence du Dieu invisible. Moïse est présent ici, sur la montagne de la transfiguration. Bien sûr, il était là, sur le Mont Sinaï, entrant dans cette nuée lumineuse, passant quarante jours sur la montagne dans une rencontre intime avec Dieu. Lors de cette rencontre, Moïse avait demandé à Dieu : « Montre-moi ta face ». Et Dieu avait répondu que cela était impossible en cette vie. Mais ici, lors de la transfiguration, Moïse voit enfin la face de Dieu. Cette rencontre de Moïse avec Jésus sur la montagne, où Jésus révèle sa divinité, reproduit donc ce qui s’est passé sur le Sinaï.

N’avez-vous pas entendu que, dans le récit de Luc, Moïse et Élie parlent avec Jésus de son « départ » qui allait s’accomplir à Jérusalem ?. Le mot littéral, l’expression littérale dans le texte grec, c’est son « exode », l’exode de Jésus qui allait s’accomplir à Jérusalem. Ainsi, saint Luc compare explicitement la passion et la résurrection de Jésus à l’exode d’Israël, à cette libération de l’esclavage en Égypte, à cette entrée dans la terre promise, en passant par le Mont Sinaï où Israël avait reçu les Dix Commandements et la charte de l’alliance que Dieu a établie avec lui.

Ici, à la transfiguration, la voix du Père se fait entendre, disant : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ! ». Désormais, c’est son Fils qu’il faut écouter. Maintenant, c’est Jésus qui prononce les paroles de l’alliance nouvelle et éternelle. À la transfiguration, Dieu nous montre que toute cette histoire, l’histoire d’Israël, l’histoire de l’humanité, notre histoire personnelle, trouve son accomplissement en son Fils Jésus. En lui, Dieu vient définitivement à notre rencontre. En lui, toutes nos faiblesses sont dépassées, transfigurées. Rien ne pourra plus nous séparer de Dieu, et il va jusqu’à nous donner sa propre gloire.

Alors, frères et sœurs, laissons cette lumière du Christ transfiguré illuminer notre chemin de Carême. Accueillons avec foi cette promesse de gloire qui nous est offerte, en nous souvenant que c’est à travers les épreuves et les défis de notre propre désert que nous pouvons, un jour, contempler la face de Dieu dans toute sa splendeur.

Amen.

Vous pouvez télécharger la feuille liturgique mensuelle