FMJ Mtl4e DIMANCHE DE L’AVENT
Frère Antoine-Emmanuel
2 s 7, 1-5.8-12.16 ; Ps 88 ; Rm 16, 25-27 ; Lc 1, 26-38
21 décembre 2014
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal

La Vierge qui enfante, c’est nous !

Quel cadeau de recevoir la Parole de Dieu !
Cadeau immense parce que la Parole de Dieu nous révèle
ce que Dieu est en train de faire dans notre histoire.
C’est ainsi que nous savons
que l’Évangile proclamé ce dimanche,
nous dit ce que le Seigneur accomplit aujourd’hui.

Or, aujourd’hui, l’Évangile
c’est une Vierge qui conçoit.
La vie en attente dans son corps de femme
est divinement fécondée.

Bien… est-ce que cela a du sens de dire
que cette Parole s’accomplit aujourd’hui ?

Qui est la vierge qui conçoit aujourd’hui
et donne au monde une vie humaine et toute divine ?

Qui est la Vierge ?
Qui parmi nous possède la virginité du cœur et de l’esprit
qui était celle de Marie à 13 ou 14 ans à Nazareth ?

Personne, me direz-vous.
Et l’on classe alors cet Évangile
parmi les glorieux souvenirs du passé.

Mais n’allons pas trop vite.
Il y a une Vierge ici.

D’abord, il y a en chacun de nous
une part virginale, pure, immaculée.
Certes, nous sommes tous défigurés par le péché originel
et par tout notre péché communautaire et personnel,
mais en-deçà de cette blessure,
il y a en nous une part divine, une part cristalline.

Nous avons perdu la ressemblance avec Dieu, oui !
Mais nous portons toujours son image gravée si profondément
que le péché ne peut la détruire.

Regardez la foi qui vous a fait venir ici ce matin.
Regardez les gestes de charité, de patience,
de pardon que vous avez posés cette semaine.
Regardez l’espérance qui scintille, même faiblement, en vos cœurs.
C’est de Dieu !
C’est Dieu en vous !
C’est le reflet de la beauté divine qui habite vos cœurs.

Maintenant, mettez ensemble la beauté qui est en chacun
de nous tous rassemblés ici ce matin,
et pensez à tout ce qu’il y a de pur, de beau, de joyeux
dans les liens qui nous unissent.

Certes, il y a l’épaisseur et la noirceur de nos indifférences,
de nos jalousies, de l’esprit de compétition ou de vantardise
et cela enlaidit notre communauté eucharistique,
mais il y a aussi et d’abord
« quelque chose » de Dieu qui nous unit.
Ce n’est pas rien de nous abreuver de la même Parole,
de nous laisser laver par la même Miséricorde,
de nous nourrir de la même Eucharistie !

La Vierge, elle est là !
C’est l’Église !
C’est cette sainteté divine vivante en nous et entre nous.

N’est-ce pas vrai qu’il y a quelque chose de magnifique
dans la communauté eucharistique que nous formons,
et cela malgré vos obscurités et les miennes ?

La Vierge est là.
La Vierge-Église !
Et à cette Vierge qui est l’Église,
le Seigneur annonce aujourd’hui qu’Elle va donner la vie.
Le dessein de Dieu, c’est de féconder la Vierge-Église
qui est là dans notre être-ensemble.

Nous allons enfanter !
Nous allons donner vie !
Dans le corps que nous formons,
il y a une vitalité en attente que le Seigneur vient féconder.

C’est-à-dire que par nous, des hommes, des femmes, des enfants
vont renaître en Dieu, vont découvrir la vie avec Dieu,
vont goûter la joie de Dieu.
Dieu nous veut féconds !

Une chose est sûre : toute la part de péché
qui est en moi et en vous et entre nous,
est absolument stérile.
Tout ce qui est péché est stérile.
Le péché ne peut enfanter que le péché et la mort.
Pensez aux enfants massacrés sauvagement
au Pakistan cette semaine.
Dès que nous nous séparons de Dieu et des autres,
nous devenons stériles.

Mais la Vierge-Église qui est la mise en commun
de la vie de Dieu que nous portons,
Dieu la rend féconde !
Le Seigneur veut une Église féconde.
Le Seigneur ne veut pas d’une Église pudibonde,
sclérosée, figée, qui n’enfante pas.

Si nous adorons les commandements,
nous serons une Église stérile.
Si nous adorons l’ordre,
nous serons stériles.
Si nous adorons la connaissance religieuse,
nous serons stériles.
Si nous adorons la puissance sur les consciences,
nous serons stériles.
Si nous adorons le pouvoir sur le monde,
nous serons stériles.

Le Seigneur ne veut pas non plus
d’une Église bien rangée, bien élevée,
comme une vieille fille préoccupée d’elle-même et de sa piété.
Il nous veut féconds !

Mais comment cela se fera-t-il ?
Nous ne sommes qu’un petit reste de croyants
bien impuissants en ce monde.
Comment notre communauté eucharistique
pourra-t-elle donner vie ?

« L’Esprit Saint viendra sur toi,
La puissance du Très Haut
te prendra sous son ombre » (Lc 1,35).

Si, ensemble, nous disons « oui » à l’Esprit Saint,
nous allons enfanter !
Nous allons enfanter des chrétiennes, des chrétiens.
Nous allons enfanter des prêtres et des consacrés.
Nous allons faire des petits !

Mais ce ne sera pas une œuvre humaine.
Inutile de flirter, de séduire, de manipuler.
Ne cherchons surtout pas à être féconds par nous-mêmes
avec tous les artifices du prosélytisme.

C’est Dieu qui donne la vie divine, ce n’est pas nous !
C’est ce que David a appris
quand il voulait être très généreux pour Dieu,
alors que Dieu attendait de lui
qu’il continue à accueillir Sa divine générosité.

C’est Dieu qui donnera la vie à travers nous.
Et Il l’a déjà fait tant et tant de fois ces dernières années.
Je vais vous donner quelques exemples.
Lors d’un parvis d’hiver,
l’un d’entre vous a rencontré
une jeune femme italienne qui,
heureuse de cette rencontre,
est revenue avec une amie iranienne.
Cette jeune femme se prépare aujourd’hui au baptême !
La Vierge-Église a enfanté !

Un autre exemple :
une jeune femme ontarienne en quête spirituelle
est venue se recueillir dans la chapelle d’adoration pendant l’été
lorsque l’adoration est assurée par des laïcs.
Là, elle a été profondément saisie
par la force de la présence eucharistique
et aujourd’hui elle chemine vers une vie consacrée.

Ou encore : un homme âgé et mal-voyant
venait souvent au Bazar.
Une des bénévoles prenait soin de lui,
lui disant si tel vêtement lui faisait ou non.
Il a dit à la bénévole :
« Savez-vous pourquoi je reviens souvent ? »
« Parce qu’ici, je suis quelqu’un ».
C’est encore la Vierge-Église qui donne vie !

Je pense aussi à la disponibilité de Claire et de Sirak
pour être à l’accueil, pour écouter.
Combien de fois des hommes, des femmes,
ont été accueillis, écoutés
et ont pu cheminer vers la rencontre avec le Seigneur.

Je pense encore à tout ce qui s’est vécu
au cours du Xe anniversaire.
Une d’entre vous a proposé une célébration œcuménique
avec des chrétiens orthodoxes
et cela a mené dimanche dernier
à une autre célébration, à d’autres rencontres œcuméniques.
C’est de la vie !

Frères et sœurs, nous allons donner vie !
Il faut seulement que nous laissions Dieu passer.

Si nous avons très très bien organisé notre Noël,
si tout est prêt dans les moindres détails
pour être sûrs de ne pas être surpris,
est-ce que Dieu pourra passer ?
Est-ce que nous pourrons donner la vie ?
Dieu ira naître ailleurs et s’il le faut,
dans une mangeoire, si toi, si moi,
nous ne Lui laissons pas de place.

Nous savons tellement bien ce qu’est Noël !
Nous avons entendu tellement d’homélies sur Noël.
Non ! Nous ne « savons » pas ce qu’est Noël
parce que Noël, c’est Dieu qui entre dans le monde.
Et Il n’a pas fini de nous surprendre.

Mais pour entrer dans le monde,
Dieu ne peut pas se passer de notre « oui ».
Pour que notre communauté eucharistique fasse des petits,
il faut que nous tous, laïcs et consacrés,
nous disions « oui ».

Dans le silence du cœur,
nous pouvons, maintenant, dire clairement au Seigneur :
« Qu’il me soit fait selon ta Parole » (Lc 1,38).

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