FMJ Mtl12e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – C
Frère Thomas
Za 12, 10-11 ; 13, 1 ; Ps 62 ; Ga 3, 26-29 ; Lc 9, 18-24
23 juin 2013
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Pour vous, qui suis-je ?

« Pour vous, qui suis-je ? » (Lc 6,20)
Cette question, que Jésus pose aujourd’hui à ses disciples,
nous l’avons affichée
dans le hall de l’église il y a deux semaines,
pendant les journées du parvis.
Beaucoup de personnes y ont répondu
en écrivant des petits mots sur un tableau.
Et il y avait de très belles réponses.

Jésus, Lui, Se présente à nous aujourd’hui
comme celui que nous avons transpercé. (cf. Za 12,10)
Voilà un aspect de la personne de Jésus
qui est au prime abord rebutant,
mais qui est incontournable, essentiel même.
Le Salut que Jésus nous apporte passe par la croix.
Il passe par nos croix.
Il nous conduit finalement – si nous le voulons bien –
à la véritable unité entre nous.
Avec Jésus, c’est « Qui perd gagne. »

Qui donc est Jésus pour nous ?
Lorsque Jésus était sur la Terre,
pour beaucoup Il était un des prophètes d’autrefois ressuscité.
Et Pierre a déclaré, sous l’inspiration de l’Esprit Saint,
qu’Il était le Messie :
c’est-à-dire le Sauveur attendu par le peuple d’Israël.

À la question « Pour vous qui suis-je ? »
nous répondrions aujourd’hui :
notre Sauveur, le sens de notre vie, l’Amour infini,
la miséricorde, le réconfort, le soutien dans nos épreuves.
Nous dirons ainsi, à notre manière,
qu’Il est un prophète, qu’Il est le Messie.

Dirions-nous que Jésus est le transpercé,
le souffrant, le rejeté, le tué ?
C’est bien ainsi que Jésus Se présente à ses apôtres
en leur annonçant sa Passion.
Certes, Il leur annonce aussi que le troisième jour Il ressuscitera.
Mais ce qu’ils retiennent, c’est qu’Il sera mis à mort.
Il faut que les apôtres comprennent
que si Jésus est le Messie,
c’est d’abord parce qu’Il est le transpercé.

Pourquoi fallait-il donc que le Messie soit rejeté, transpercé ?
Déjà le prophète Zacharie annonçait :
Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé.
Ils feront une lamentation sur lui
comme sur un fils unique. (Za 12,10)

Jésus disait et faisait des choses qui dérangeaient.
Il exhortait le peuple, et les chefs du peuple,
à ne pas vivre leur religion de façon hypocrite,
avec des faux-semblants.
Mais cela déjà les prophètes avant lui le disaient.
Il opérait des guérisons, des miracles.
Mais cela déjà Moïse le faisait.

Si Jésus a été mis à mort,
c’est parce qu’Il disait être le Fils de Dieu :
c’était là son chef d’accusation devant Pilate.
Les chefs religieux d’Israël
ne voulaient pas être fils de Dieu.
Ils tenaient à ce qu’une distance
soit maintenue entre eux et Dieu.
C’est pour cela qu’ils ont décidé la mise à mort de Jésus.
Jésus n’est pas bienvenu
quand Il appelle les humains
à faire partie de la famille de Dieu.

De plus, Jésus n’a pas fui ceux qui s’opposaient à Lui,
au contraire, Il n’a eu de cesse
de chercher la confrontation avec eux.
Il est même allé à Jérusalem pour la fête de la Pâque
quand les chefs des prêtres
avaient résolument décidé de la mettre à mort.
La prophétie de Zacharie s’est réalisée :
« En ce jour-là,
il y aura une grande lamentation dans Jérusalem. (Za 12
En ce jour-là, il y aura une source qui jaillira (…)
elle les lavera de leur péché et de leur souillure. »

Si notre Messie,
si notre Sauveur est un transpercé,
cela est pour nous à la fois occasion de douleur et d’espérance.

Que nous apporte finalement Jésus en son Salut ?
Il nous fait d’abord devenir à notre tour des transpercés.
Drôle de Salut, drôle de perspective.
Qui en voudrait ?

À Sainte Thérèse d’Avila qui criait à Jésus
son dépit de devoir vivre tant de difficultés à cause de Lui,
Jésus répondait : « C’est ainsi que Je traite mes amis ».
Et Thérèse Lui rétorquait :
« C’est pour cela que vous avez si peu d’amis. »

Jésus nous le dit bien aujourd’hui :
« Celui qui veut marcher à ma suite,
qu’il renonce à lui-même,
qu’il prenne sa croix chaque jour, et qu’il me suive. »
Mais Il ajoute :
« Celui qui veut sauver sa vie doit la perdre ;
mais celui qui perdra sa vie pour Moi la sauvera. » (Lc 9, 23-24)

Ce qui change tout, c’est le « pour moi ».
Si Jésus a été rejeté, mis à mort, transpercé pour nous.
Si nous Le suivons, nous le seront tôt ou tard… pour Lui.
Mais en quoi cela nous apporterait-il le Salut ?
Si Jésus est venu chez nous,
c’est pour unir les humains et Dieu.
S’Il a été mis à mort,
c’est parce que les humains n’ont pas voulu de Dieu chez eux.
Mais c’est précisément ainsi
qu’Il S’est encore plus rapproché d’eux.

Ainsi nous, si nous sommes unis à Jésus,
les autres humains ne voudront pas de nous
dans la mesure où ils ne voudront pas de Dieu.
Être transpercé avec Jésus sera alors pour nous salutaire,
car ainsi nous participerons à son œuvre
d’unité des humains avec Dieu, et des humains entre eux.

Sommes-nous transpercés, parce que notre conjoint ne croit pas,
parce que nous enfants, notre famille ne croient pas ?
Plutôt que de nous en plaindre,
réjouissons-nous de contribuer à la croissance de leur foi.
Sommes-nous transpercés
parce que la société se sécularise, se laïcise,
que les signes religieux disparaissent,
que des lois irrespectueuses de la vie ou du mariage apparaissent ?
Réjouissons-nous de témoigner du Christ par notre vie,
dans la société telle qu’elle est.

Le Christ n’est pas venu faire l’unité des humains par la force
ni par la séduction, autour de sa Personne.
Il est venu unir le juif et le païen, l’esclave et l’homme libre,
le conservateur et le progressiste, le riche et le pauvre,
le jeune et le moins jeune, l’homme et la femme
par la foi libre en sa personne.
Cette unité, ce salut, passent par le rejet, par la mort, par la croix.
Mais alors ils sont véritables et durables.

Après avoir prié à l’écart Jésus nous demande :
« Pour vous, qui suis-Je ? »
Dirons-nous : « le Transpercé » ?
Mais si nous prenons notre croix avec Lui,
si nous perdons notre vie pour Lui,
alors nous comprendrons toute la puissance de Salut et d’unité
pour le genre humain dans sa croix !

© FMJ – Tous droits réservés.