sanct - smSamedi après le Mercredi des Cendres – C
Mgr Jacques Berthelet, csv
Is 58, 9-14 ; Ps 85 ; Lc 5, 27-32
13 février 2016
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Appelé à suivre le Christ

Mes frères, mes sœurs,

Saint Luc, l’évangéliste de la Miséricorde, nous relate la vocation de Lévi, dont le nom est plutôt Matthieu dans les évangiles de Marc et de Matthieu. Jésus vient de guérir un paralysé à qui Il a d’abord pardonné les péchés, ce qui crée une controverse. Il sort de la maison où Il a opéré ce double miracle et Il remarqua, Il vit, un publicain du nom de Lévi ou de Matthieu. Publicain, il est reconnu comme pécheur parce qu’il collecte l’argent des pauvres au bénéfice du pouvoir impérial et, bien sûr, en passant, à son propre bénéfice. L’évangéliste Luc, comme aussi Marc et Matthieu, vont signaler la réaction des scribes et des pharisiens qui se scandalisent de ce que Jésus mange et boive avec les publicains, de ce qu’il soit l’ami des pécheurs.

Cette vocation de Matthieu nous rappelle la première entrevue que le pape François a donnée aux revues culturelles des Jésuites . À la question « Qui est Jorge Mario Bergolio ? », le pape François répond : « Je suis un pécheur … Je suis un pécheur sur qui le Seigneur a posé son regard. » Il poursuit : « Je suis un pécheur regardé par le Seigneur. Ma devise, Miserando atque eligendo (Il m’a choisi, élu, en me faisant miséricorde), je l’ai toujours ressentie comme profondément vraie pour moi ». Et pour expliquer sa devise, il parle du tableau de la vocation de Matthieu de Caravage qui est à l’église Saint-Louis des Français à Rome : « le doigt de Jésus vers Matthieu, dit il, c’est comme cela que je suis. Moi. C’est ainsi que je me sens, comme Matthieu (…) c’est le geste de Matthieu qui me frappe : il attrape son argent comme pour dire ‘Non, pas moi ! Non, ces sous m’appartiennent!’. Voilà ce que je suis : un pécheur sur lequel le Seigneur a posé les yeux. C’est ce que j’ai dit quand on m’a demandé si j’acceptais mon élection au Pontificat ». Il murmura alors : Je suis pécheur, mais, par la Miséricorde et l’infinie patience de Notre-Seigneur Jésus Christ, je suis confiant et j’accepte en esprit de pénitence. »

La vocation de Matthieu et la vocation du Pape François nous disent ce qu’est la miséricorde ; elles nous disent comment Jésus est le Visage de la Miséricorde du Père. Cette Miséricorde qui est bienveillance et bonté, tendresse et pitié, se traduit toujours par un appel à suivre Jésus. Suis-Moi. Et cette suite de Jésus est toujours une conversion, une conversion continuelle. Je suis venu appeler les pécheurs pour qu’ils se convertissent et me suivent.

Frère Pierre-Marie, en mars 2012, avait écrit un article fort interpellant sur « les deux conversions du frère Charles ». Pour ceux et celles qui se réunissent aujourd’hui pour le mieux connaître, je me permets de citer un court extrait de cet article de la revue Sources vives qui est la revue des Fraternités de Jérusalem.

Octobre 1886. « Vint alors le jour que tout en lui avait préparé, où, sans qu’il l’ait prévu, il tomba à genoux pour se relever littéralement converti. Ce jour là, il dit : Ma vocation date de la première heure de ma foi. À partir du moment où j’ai cru, j’ai su que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour Dieu. Un homme nouveau était né. Il ne reviendrait jamais en arrière ».

Frère Pierre Marie nous rappelle ensuite les circonstances de sa deuxième conversion, en 1908, 22 ans plus tard : « Du fait du froid, de l’excès de travail et du manque de sommeil, il est très affaibli. Une terrible famine sévit alors…Depuis deux ans il n’y a pas eu de pluie. Ayant un peu tout donné à plus pauvre que lui, il attrape le scorbut et vire à l’anémie. Malade, épuisé, il est persuadé que sa dernière heure est venue. Tout est fini. »

« Cette maladie de janvier 1908, en provoquant un élan d’authentique charité parmi les gens de Tamanrasset, non seulement a converti l’âme de frère Charles à un surcroît de sainteté, mais encore a valu à ces populations « infidèles » d’entendre un jour la voix du Christ leur dire : Venez les bénis de mon Père, car j’avais faim et vous m’avez donné à manger, j’avais soif et vous m’avez donné à boire, j’étais malade et vous m’avez visité. En se convertissant à eux, il les avait convertis à Dieu. »

Vous avez reconnu le chapitre 25 de Matthieu qui a inspiré le développement des œuvres de miséricorde spirituelles et corporelles. Chacun, chacune de nous est appelé à suivre le Christ, à se tourner vers Lui, et à découvrir ainsi son chemin de conversion et à être miséricordieux comme le Père. C’est la grâce que nous pouvons nous souhaiter en ce carême de l’Année du jubilé extraordinaire de la Miséricorde. AMEN