FMJ Mtl3e DIMANCHE DE L’AVENT « GAUDETE » – C
Frère Antoine-Emmanuel
So 3, 14-18 ; Is 12 ; Ph 4, 4-7 ; Lc 3, 10-18
13 décembre 2015
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal

Les demandes du Seigneur à son Peuple

Avez-vous entendu les quatre demandes
que le Seigneur fait à son peuple,
à Israël, à la fille de Sion ?
« Crie de Joie ! »
« Éclate en ovation ! »
« Réjouis-toi ! »
« Tressaille d’allégresse ! » (So 3,14)

Mais comment peut-on être si joyeux
sur une terre qui est si souvent une vallée de larmes ?
Parce que le Seigneur
a levé les sentences qui pesaient sur toi ;
Il a détourné ton ennemi (v. 15).
Il est désormais au milieu de toi
et Il te renouvelle dans son amour (v.17).

Regardez cette tendresse de Dieu
qui voit son peuple enfargé dans son péché,
dans ses trafics, dans ses vices, dans ses trahisons
et qui vient se faire proche.
Le cœur de Dieu se retourne contre Lui-même
et dépassant toute justice,
allant au-delà de toute justice,
Dieu répand son pardon, libère, guérit
et relève son peuple.
Il nous renouvelle dans son amour.
Il fait de nous de nouvelles créatures.

Voilà la folie de l’amour de Dieu.
Sans cette folie d’amour, moi-même,
je serais incapable de me tenir
à cet ambon devant vous,
parce que je suis pécheur.
Parce que j’ai péché et donc nécessairement,
j’ai entraîné d’autres dans le péché.

Et nous, tous moines et moniales,
nous ne pourrions rester
en vêtements blancs devant vous
sans la miséricorde de Dieu.
Le blanc que nous portons
n’est pas le blanc de vies impeccables,
mais la blancheur du pardon.

Le pape lui-même le disait
à des prisonniers rencontrés en Bolivie :
« Je suis un homme pardonné ».
« Je suis pécheur, je me sens pécheur,
je suis sûr de l’être ; je suis un pécheur
que le Seigneur a regardé avec miséricorde ».

Avez-vous remarqué que depuis 50 ans,
l’Église parle de plus en plus de miséricorde ?
Paul VI a commencé, puis surtout Jean-Paul II
avec sa lettre « Dives in Misericordiae »,
avec la canonisation de sœur Faustine
et avec l’institution de la Fête de la Miséricorde divine.

Et de quoi le Pape François a-t-il parlé
dans son premier Angelus ? De la miséricorde !
Et deux ans plus tard, que nous offre-t-il ?
Un jubilé extraordinaire de la miséricorde.
Et il l’explique : « J’ai senti
qu’il y a comme un désir du Seigneur
de montrer aux hommes sa miséricorde.
Ce n’est pas une stratégie.
C’est venu à l’intérieur de moi.
L’Esprit Saint veut quelque chose.
Il est évident que le monde d’aujourd’hui
a besoin de miséricorde,
qu’il a besoin de compassion.
Nous sommes habitués aux mauvaises nouvelles,
aux nouvelles cruelles et aux atrocités.
Le monde a besoin de découvrir que Dieu est Père,
que la miséricorde existe,
que la cruauté ne mène à rien,
que la condamnation ne mène à rien.
J’ai senti que Jésus veut ouvrir la porte de son Cœur,
que le Père veut montrer ses entrailles de miséricorde
et que pour cela, Il nous envoie l’Esprit Saint,
pour nous mettre en marche et nous secouer ».
(extraits de l’interview du Pape François
à la revue « Credere »).

Ce Jubilé n’est donc pas une stratégie pastorale,
mais un appel du Seigneur.
Le Seigneur frappe à la porte de nos cœurs
pour y déverser sa miséricorde.
Dieu notre Père veut manifester au monde d’aujourd’hui
la profondeur de son amour.
Cet amour qui sympathise avec la faiblesse,
qui déverse son amour, son cœur, dans notre faiblesse ;
cet amour qui est même indulgence
qui veut guérir les conséquences du péché dans nos vies.
C’est « l’Indulgence du Père ».
Ce n’est pas du commerce d’indulgences (au pluriel),
mais l’Indulgence du Père qui nous embrasse,
nous caresse, nous restaure.

Vous percevez cet amour du Père
qui dansera de joie avec des cris de joie
quand nous dirons oui à la miséricorde.

À quoi cela se voit
que quelqu’un a dit oui à la miséricorde de Dieu ?
Au fait qu’il – ou elle – devient miséricordieux
pour soi-même et pour les autres.
Quand vous sentirez monter en vous
une nouvelle tendresse pour tout ce qui est pauvre,
blessé, blessant en l’autre et en vous,
dites-vous que le Jubilé a commencé à porter son fruit.

Alors, quelle route prendre pour ce Jubilé ?
Notre évêque, dans sa lettre reproduite dans le semainier
nous propose trois étapes :
la première est de contempler cet Amour
et de nous en imprégner.
La deuxième sera d’entreprendre
des démarches de pardon et de réconciliation.
La troisième sera de porter aux « périphéries »
la bonne nouvelle de la tendresse de Dieu.

La première étape est donc, maintenant,
de contempler la Miséricorde divine.
Je vous invite à embarquer dans ce défi contemplatif.
Prenez votre Bible et lisez, et cherchez, et contemplez.
Dans l’Ancien Testament en particulier,
vous rencontrerez trois mots-clés.

Le premier est « emet » qui signifie la fidélité,
la solidité de l’amour de Dieu.
Tu te sens pauvre, inconstant… c’est vrai.
Mais l’amour de Dieu est constant,
solide comme un chemin sûr
sur lequel tu peux t’avancer en toute confiance.

Le deuxième est « hered »,
qui signifie une faveur imméritée, une bienveillance
complètement indépendante de nos mérites.
Tu te sens lâche vis-à-vis de Dieu,
absolument pas à la hauteur de ce que Dieu attend de toi.
Sa « jered » te dit que tu es aimé sans mesure…

Le troisième enfin est « rahamim »,
terme qui signifie les entrailles maternelles, l’intérieur.
L’amour de Dieu est viscéral,
il n’est pas séparable se son Être,
il est indéracinable et d’une tendresse maternelle extraordinaire.

À partir de ces termes, à vous de chercher, de contempler.
Vous pouvez par exemple partir de tous les textes cités
par la lettre du Pape « Le visage de la Miséricorde »

Vous voulez que votre vie change ?
Vous voulez que le monde soit transformé ?
Au travail !

Nous avons aussi des outils à notre déposition.
Notamment ce que le diocèse a mis en ligne sur son site,
les rendez-vous qui nous sont proposés,
mais surtout un outil très précieux, très efficace, le pèlerinage.
Nous sommes tous invités à vivre cette année des pèlerinages.
Un pèlerinage, c’est choisir de quitter mon lieu de vie,
et donc mes habitudes,
de marcher, de me fatiguer, de prier, de méditer
pour rejoindre un lieu de grâce,
un lieu de rencontre de Dieu et de repartir transformé.

Je quitte, je marche, je passe d’une vie peu miséricordieuse
à une vie renouvelée où la miséricorde devient puissante en moi.
C’est un passage.
Je passe d’une culture du succès, de la performance,
de l’individualisme à une culture de tendresse et de miséricorde.
Pour nous aider à sentir et à vivre ce passage,
le Pape François a voulu que l’on utilise le symbole de la porte.
Ce n’est pas magique.
Tout dépend de la démarche intérieure que vous ferez !
Mais ce peut-être un pèlerinage déterminant pour votre vie,
parce que le Seigneur nous attend.

Je prends un exemple.
Vous fixez une date.
Vous choisissez une église où il y a une porte de la miséricorde.
Vous vous préparez par des lectures, de la prière,
un entretien avec un(e) ami(e) qui a une expérience spirituelle.
Et le jour venu vous partez, à pied si possible,
sinon par le moyen que vous voulez.
Vous partez avec le désir
de vous convertir davantage à la miséricorde.
Vous partez en portant dans votre cœur un vivant ou un défunt
qui a besoin de la tendresse de Dieu.
Vous allez près de la porte.
Vous priez, vous priez, vous priez.
Vous passez la porte pour dire :
oui, Père, je veux entrer dans ta miséricorde ;
je dis oui à ta tendresse imméritée.
Puis, vous allez recevoir le sacrement du pardon
pour entrer dans la vie nouvelle.
Ensuite, vous vivez un moment de communion,
en priant le Credo de l’Église,
en priant au moins aux intentions du Pape François
et en demandant au Père son indulgence
pour la personne que vous portez dans votre cœur.
Puis vous vivez avec intensité la messe
ou un temps d’adoration eucharistique.

Ça, ça vous refait le cœur…
Mais… à une condition : que vous y mettiez votre cœur !
C’est en fait un vrai chemin de conversion !
La miséricorde de Dieu ne nous dispense pas de la conversion ;
au contraire, elle provoque en nous la conversion.
C’est pour cela que le message de Jean-Baptiste
est une Bonne nouvelle.
Jean-Baptiste, qui était pleinement conscient
de la gravité et de l’horreur du péché du monde,
avait perçu que Dieu ne condamnait pas le monde,
mais offrait au monde un chemin de guérison, de salut,
dans la personne de Jésus.
Jean a compris qu’Israël avait une dernière chance,
une planche de salut.
Il a perçu que la miséricorde divine
venait à notre rencontre
et nous appelait à la conversion.
Conversion du cœur qui se traduit,
se manifeste dans des œuvres de miséricorde.

Chers frères et sœurs,
Belle année sainte !
Que chacun de nous, nous devenions plus miséricordieux
et nous serons alors des artisans
de la révolution de la tendresse
dont notre monde a tant besoin.

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