sanct - smSamedi, après les Cendres – B
2e anniversaire du décès de fr. Pierre-Marie
Mgr Jacques Berthelet, c.s.v.
Is 58, 9-14 ; Ps 85 ; Lc 5, 27-32
21 février 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

La conversion, la miséricorde : la donner et la demander.

Mes frères, mes sœurs,

Jésus vient de passer 40 jours au désert. Et sa vie publique commence. Il annonce son programme : « Les temps sont accomplis. Le royaume de Dieu est tout proche, convertissez-vous et croyez à la Bonne nouvelle » (Mc 1,15). Il choisit quelques disciples, Il prêche, Il guérit les malades. C’est après avoir guéri un lépreux, puis un paralytique, en sortant de la maison où il était, qu’Il aperçoit un collecteur d’impôt, un publicain. Il le voit, assis à son bureau…

Dans une entrevue qu’il a donnée à la revue jésuite Civilta cattolica, le Pape François nous parle de cette vocation de Matthieu en décrivant la peinture que le Caravage a faite de l’appel de Jésus à le suivre. Cette peinture est à l’église Saint-Louis des Français à Rome, tout près de la Casa internationale Paolo Sesto où il avait l’habitude de résider lorsqu’il allait à Rome comme évêque. Nous voyons Mathieu occupé à compter son argent. Jésus a la main tendue vers lui… à la manière du Créateur qui donne vie à Adam. L’appel de Jésus va donner une nouvelle vie à Lévi. Il s’appellera dorénavant Matthieu dans sa nouvelle vie. Jésus lui dit : « Suis-Moi ! ». L’homme se leva et se mit à le suivre (Lc 5, 28). Il se leva : surrexit ! Abandonnant tout, l’homme se leva et se mit à le suivre.

En ce jour anniversaire de la pâque du frère Pierre Marie, fondateur des Fraternités monastique de Jérusalem, je ne puis m’empêcher de rappeler que sa vie de Fondateur a aussi commencé au désert, comme Jésus ; que comme Jésus, il a appelé des disciples à le suivre, ou mieux à suivre Jésus avec lui.

Matthieu donc se mit à suivre Jésus. Or, pour suivre Jésus, et surtout pour répondre à la demande d’aller annoncer la Bonne nouvelle jusque dans les périphéries existentielles, il faut tout abandonner. Il faut tout abandonner, il faut recommencer chaque jour à tout abandonner pour être crédible, pour que la prédication de la Bonne nouvelle porte du fruit.

Après Jésus, tous ceux dont la prédication en acte et en parole quand c’est nécessaire, pour que ce témoignage soit crédible, soit fructueux, ceux-là devrons d’une façon ou d’une autre se vider de ce qui leur est propre pour annoncer efficacement la proximité du Règne de Dieu. Le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-Vous ! Pour dire cela, il ne faut pas être plein de soi-même, il faut être plein de la Parole de Dieu et de la volonté de Dieu. C’est en ce sens là que je dis qu’il faut tout abandonner. Il faut se vider de soi-même. Et c’est le jeûne que Dieu demande à ceux et celles qui veulent être des témoins en actes et en parole du Règne de Dieu. La vie du Père Pierre-Marie, ses actes et ses paroles témoignent du Règne de Dieu.

Mais revenons à l’Évangile (nous ne sommes pas loin de l’Évangile lorsque nous parlons de la vie de fr. Pierre-Marie) mais revenons à la lettre de l’Évangile. Jésus choisit donc un publicain, un collecteur d’impôt pour l’occupant romain. Ce n’st pas très glorieux ! Un collecteur d’impôt qui s’enrichit sur le dos des plus pauvres. Mais en choisissant un publicain, et en participant au repas d’adieu que Lévi offre à ses anciens collègues publicains, Jésus brise les barrières sociales et religieuses et fait table commune avec les pécheurs, car justement les publicains sont reconnus comme des pécheurs publics.

Et la réponse de Jésus à ceux et celles qui se scandalisent du choix de Lévi et du festin offert à une grande foule de publicains la voici : « Ce ne sont pas les gens en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je suis venu appeler non pas les justes mais les pécheurs pour qu’ils se convertissent » (Lc 5, 31-32). C’est réconfortant de nous entendre dire cela. Nous sommes malades, nous sommes des pécheurs. C’est pour nous que Jésus est venu.

La vie à la suite du Christ est pour ceux et celles qui reconnaissent leur besoin d’être pardonnés. La vie à la suite du Christ, elle est faite pour ceux et celles qui entendent cet appel à la conversion. C’est le Bonne nouvelle qui nous est proposée aujourd’hui. Et elle nous rejoint tous dans chacune de nos vocations particulières. Laissant tout, abandonnant tout, cela ne veut pas nécessairement dire quitter le monde. Jésus disait à son Père : « Je ne te demande pas de les retirer du monde. Je te demande de les garder du mauvais » (Jn 17,15)

Je vous propose de retenir trois choses pour le carême qui commence à partir de cet évangile :

1. Avoir le regard de Jésus : Il voit et Il appelle. C’est ce qu’Il a fait avec Lévi. Tout le monde peut faire ça. Voir le prochain comme un frère, comme une sœur et les appeler.

2. Abandonner tout et se mettre à Le suivre. Ou au moins, abandonner tout ce qui nous empêche de suivre Jésus. Autrement dit ne pas s’enfermer sur soi-même mais s’ouvrir aux autres comme chemin pour aller à Dieu. C’est le même chemin qui conduit à Dieu que le chemin qui conduit à nos frères et sœurs.

3. La conversion, la miséricorde : la donner et la demander. À Dieu et aux autres.

Si tu fais cela dit Isaïe, le prophète qui va nous bousculer tout au long du carême, « ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera comme la lumière de midi. Le Seigneur sera toujours ton guide. En plein désert, Il te comblera et te rendra vigueur » (Is 58, 10-11).

Montre-nous Seigneur la route qui mène vers Toi. AMEN