sanct - smFÊTE (anticipée) DES SAINTS MARTYRS CANADIENS
Mgr Jacques Berthelet, csv
Ro 8, 31b-39 ; Ps 123 ; Jn 12, 24-26
24 septembre 2016
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Qu’il me suive là où Je suis

Mes frères, mes sœurs,

La profession religieuse de frère Gérard par les vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, entre les mains du Prieur général et suivant les Constitutions des Fraternité monastique de Jérusalem (frères), constitue un événement très important pour la Fraterni-té, pour la communauté chrétienne du Sanctuaire du Saint-Sacrement et pour l’Église. Le saint pape Jean-Paul II, dans son exhortation apostolique sur La vie consacrée allait jusqu’à dire que « la vie consacrée, présente dès les origines, ne pourra jamais faire défaut à l’Église, en tant qu’élément constitutif et irremplaçable qui en exprime la nature » (n.29, § 2). Jamais une affirmation aussi forte n’avait été faite par le magistère de l’Église au cours de l’histoire. « La vie consacrée, élément constitutif et irremplaçable qui exprime la nature même de l’Église ». Et cela advient, concrètement, visiblement, quand un religieux ou une religieuse fait profession perpétuelle, et cela advient aujourd’hui, en la fête antici-pée de saints martyrs canadiens.

Le mot grec « martyr » se traduit en français par le mot « témoin ». Et le martyre est le témoignage suprême de la suite du Christ jusque dans la mort. Le religieux, nous dit en-core Jean-Paul II, s’engage à être un témoin qui « a pour mission de rendre présente en quelque sorte la forme de vie que le Christ a choisie, en montrant qu’elle est absolue et eschatologique » (V.C., n.29, § 3).

Il est donc heureux que la profession perpétuelle de frère Gérard coïncide avec la fête de saint Jean de Brébeuf et Isaac Jogues, prêtres, et leurs compagnons, martyrs, patrons se-condaires du Canada. Le martyre est le témoignage suprême de la foi au Christ, de la « suivance » du Christ pauvre, chaste et obéissant. C’est bien ce que la liturgie de la fête d’aujourd’hui nous enseigne.

« Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive et là où je suis, là sera mon serviteur ». La suite du Christ est un service que le Père honorera. Mais avant les honneurs, il y a le ser-vice, et ce service est d’abord la suite du Christ, pour les religieux, suite du Christ dans la forme de vie qui fut la sienne, une suite qui prend les couleurs, le charisme, des fraternités monastiques de Jérusalem, telles qu’illustrés dans les Constitutions et le Livre de vie qui développe votre spiritualité au jour le jour. Service de vos frères et sœurs – qui sont votre prochain, ceux dont vous êtes proches – service de faire communauté pour que l’Église soit communauté ; service de la grande fraternité monastique ; service de la communauté du Sanctuaire du Saint-Sacrement, service aux petits et aux pauvres que vous accueillez volontiers, car chaque fois que vous les accueillez, c’est le Christ que vous accueillez et qui vous accueille à sa tour. Service de l’Église par votre présence à cette Église diocé-saine de Montréal et des alentours de Montréal et à tous ceux qui forment ces Églises.

La suite du Christ est aussi obéissance au Christ. La profession de Frère Gérard, votre profession de tous les jours, dit à tout le monde que même si nous avons pêché toute la nuit sans rien prendre, il nous faut obéir au Christ qui nous demande de lancer les filets en plein jour pour que l’Évangile soit annoncé, pour que la miséricorde de Dieu soit montrée, pour que de nouveaux disciples se mettent à sa suite et que de nouveaux collaborateurs et collaboratrices se consacrent à Dieu. Nous ne pouvons pas nous laisser enlever l’espérance que par notre consécration l’Évangile est annoncé, le monde devient meilleur. En suivant le Maître, en le servant fidèlement, vous offrez un témoignage qui finira bien par toucher le cœur d’autres personnes qui entendront l’appel du Seigneur à le suivre eux aussi. Et le Père les honorera, il leur offrira l’honneur de son amour. L’amour est le fruit de l’Esprit et saint Paul le décline en soulignant qu’il est patient, humble, qu’il rend service, qu’il trouve sa joie dans la vérité, qu’il croit tout, endure tout, espère tout. C’est la description de la communauté idéale, de la fraternité de ceux ou celles qui vivent perpétuellement, cons-tamment, jour après jour la profession qu’ils ont fait un jour.

C’est le même saint Paul qui, quelques chapitres plus tôt, affirmait que rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ notre Seigneur. Ni la mort, ni la vie, et nous pouvons ajouter tous les obstacles possibles : ni la maladie, ni les incom-préhensions, ni les contradictions ni les souffrances que nous pouvons connaître dans l’Église ou dans nos communautés. « En tout cela, nous sommes plus que vainqueurs, nous dit saint Paul, en celui qui nous a aimés ».

Vous, frère Gérard, vous qui avez accompagné le frère Pierre-Marie dans sa maladie et jusqu’à son agonie, vous qui depuis plusieurs mois, connaissez la condition de la maladie, vous avez aussi l’expérience que ce n’est pas cela qui éloigne de l’amour du Christ notre Seigneur, bien au contraire, quand nous vivons ces moments dans la foi en celui qui a vaincu la mort.

Encore un mot pour dire que nous célébrons cette profession perpétuelle au cœur d’une Eucharistie, au cœur de la nouvelle Alliance. La profession est aussi une alliance et elle prend tout son sens dans l’alliance nouvelle et éternelle qui est réactualisée en chaque Eu-charistie. C’est ainsi qu’ont vécu les saints martyrs canadiens, c’est ainsi que le frère Gé-rard est appelé à vivre par sa profession perpétuelle, c’est ainsi que nous sommes tous unis pour rendre gloire au Dieu qui est Amour. AMEN !