FMJ Mtl5e DIMANCHE DE CARÊME – C
Frère Antoine-Emmanuel
(3e scrutin des catéchumènes)
(A) Éz 37, 12-14 ; Ps 129 ; Rm 8, 8-11 ; Jn 11, 1-45
13 mars 2016
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal

Vers la plénitude de la foi

Avez-vous remarqué les premiers mots de Marthe
quand Jésus arrive près de Béthanie ?
« Seigneur, si Tu avais été là,
mon frère ne serait pas mort ! » (Jn 1,11)

Ce sont exactement les mêmes paroles
que Marie dit ensuite à Jésus
quand elle arrive auprès de Lui :
« Seigneur, si Tu avais été là,
mon frère ne serait pas mort ! » (Jn 11,32)

Les juifs eux-mêmes, venus nombreux,
ce qui indique que Lazare était un personnage connu,
disent à leur tour :
« Ne pouvait-Il pas, Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle,
faire que celui-ci ne meure pas ? » (Jn 11,37)

C’est de fait tellement étonnant et même déconcertant :
Jésus n’est pas venu au chevet de Lazare,
malade, son grand ami.
Jésus n’est pas venu pour ses funérailles.
Jésus n’était toujours pas là le matin du 4e jour…

Or Jésus avait accouru
auprès de la fille de Jaïre mourante (cf. Lc 8,42).
Jésus avait ressuscité immédiatement
le fils de la veuve de Naïm éplorée (cf. Lc 7,12).
Jésus avait même guéri à distance
le serviteur du fonctionnaire royal de Capharnaüm (cf. Jn 4,46 s.s.).

Mais ici, Jésus est resté au loin,
alors même qu’il s’agissait d’un grand ami
et du frère de deux femmes
qui étaient parmi ses plus proches disciples !

Devant cette attitude déconcertante de Jésus,
il nous faut réécouter ce que Jésus dit aux apôtres :
« Lazare est mort, et Je me réjouis à cause de vous ;
si Je n’étais pas là, c’est pour que vous croyez » (Jn 11,15).

« C’est pour que vous croyez… »

La santé est un don de Dieu
et Dieu n’est ni l’auteur ni le complice de la maladie.
L’amitié est un grand don de Dieu
et l’Écriture elle-même dit :
« n’abandonne pas ton ami » (Pv 27,10)
ou encore « n’oublie pas un ami dans ton cœur » (Sir 37,6).

Mais pour Jésus, il y a quelque chose de plus grand,
une santé et une amitié qui sont au-delà
de ce qui est de cette terre : la foi.

« C’est pour que vous croyez » dit-Il aux apôtres.

« C’est à cause de cette foule alentour que J’ai parlé
dit Jésus après avoir béni le Père devant la tombe de Lazare,
afin qu’ils croient en Moi que Tu as envoyé » (Jn 11,42).

On perçoit ici le désir brûlant de Jésus
de susciter la foi en chacun de nous.
Jésus veut nous acheminer vers une vie de croyants.
Jésus veut nous donner un cœur de croyant.

Et, osons le dire, Jésus est pris à nous laisser un moment
face à l’obscurité de la mort,
pour que nous accédions à la vraie foi.

Mais de quelle foi s’agit-il ?
Souvenez-vous de l’échange entre Jésus et Marthe.
Marthe croit en Dieu, elle est une grande croyante.
Marthe croit en Jésus :
elle n’a aucun doute que tout ce que Jésus demandera à Dieu,
Dieu le Lui donnera.
Marthe croit en la résurrection.
Elle sait, avec toute une mouvance du judaïsme,
que son frère ressuscitera au dernier jour.

Mais Jésus veut l’amener plus loin :
Il appelle Marthe à entrer dans la plénitude de la foi ;
et cette plénitude c’est de reconnaître
que Jésus est en personne la Résurrection et la Vie.

Une chose est de croire en la résurrection.
Une autre est de croire que la résurrection c’est quelqu’Un,
c’est Jésus.

La résurrection n’est pas un phénomène, même divin,
elle n’est pas une mécanique miraculeuse :
elle est une Personne.
Il n’y a de résurrection,
il n’y a de Vie éternelle
qu’en Jésus,
en Sa Personne,
en Lui…

Le passage de la mort à la Vie éternelle
ce n’est pas un processus… c’est une Personne,
c’est une rencontre,
c’est une communion à Jésus mort et ressuscité.

*

Vous avez entendu la prophétie d’Ézéchiel ?
« Vous connaîtrez que Je suis le Seigneur
quand j’ouvrirai vos tombeaux
et que Je vous ferai remonter de vos tombeaux, ô mon peuple.
Je mettrai mon souffle en vous pour que vous viviez.
Je vous établirai sur votre sol » (Éz 37, 12-13).

Regardez Dieu qui ouvre les tombeaux…
Contemplez Dieu qui nous tire de nos tombeaux…

La mort est puissante.
La mort est toute puissante
parce que le péché nous entraîne dans la mort.
« Notre corps est voué à la mort
à cause du péché » dit Paul (Rm 8,10).
« Mais l’Esprit est notre vie à cause de la justice » (Id.)
à cause du don de grâce qui nous vient de Jésus.

Et Paul poursuit :
« Si l’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts
habite en vous… » (cf. Rm 8,11)
Si l’Esprit du Père, L’Esprit Saint, habite en nous,
alors le Père donnera aussi la vie à nos corps,
à nos corps mortels, par son Esprit Saint qui habite en nous.

L’Esprit Saint nous unit à Jésus dans sa mort et sa résurrection.
L’Esprit Saint nous lie à Celui qui est en personne
la Résurrection et la vie.

Voilà la foi vers laquelle Jésus veut nous conduire.
Ce n’est pas une foi seulement intellectuelle,
une conviction, une idée,
c’est une rencontre qui commence aujourd’hui.

*

C’est aujourd’hui, c’est ce matin,
que Celui qui est la Résurrection se fait proche de chacun de nous
pour ouvrir nos tombeaux et nous en faire sortir.

Pensez à la demande que Jésus fait
devant Marthe, Marie et tous ceux qui étaient là :
« Enlevez la pierre » (Jn 11, 39).

Ce qui pour nous est mort,
ce qui pour nous est sans espérance,
ce qui pour nous ne peut qu’être un échec et une honte,
Jésus sait en faire le lieu où triomphe la vie.

Il s’agit d’enlever la pierre
et de laisser la Parole de Jésus rejoindre
les profondeurs de nos tombeaux
et sa Parole suscite la Vie.

Si tu es pris dans l’esclavage de l’argent ou du jeu,
souviens-toi de la Parole de Jésus :
« Je suis la Résurrection et la Vie » (Jn 11,25).
Si tu es aux prises avec ton tempérament,
incapable de d’adoucir, souviens-toi :
Jésus est la Résurrection.

Si tu vois que ta sensualité t’emporte malgré toi,
rappelle-toi : Jésus est la Résurrection.
Si tu es dans une situation familiale,
professionnelle, financière ou de voisinage
qui ressemble à un enfer, n’oublie pas :
Jésus est la Résurrection.

Si la maladie ou la dépression t’emportent inexorablement,
garde au cœur cette parole :
Jésus est la Résurrection.

Et plus encore :
si tu souffres avec et pour tous les opprimés,
les exclus, les pauvres,
souviens-toi que pour eux, Jésus est la Résurrection.

Et plus encore :
si tu portes avec douleur le souci des âmes les plus perdues,
craignant pour elles la perspective de l’Enfer,
souviens-toi que Jésus est pour tous la Résurrection et la Vie.
Et ne désespère jamais.

Parce que Jésus ne cesse de nous appeler de la mort à la Vie :
« Lazare, viens dehors ! » (Jn 11,43)
Nous pouvons y mettre chacun notre prison
et dans un instant, ce sont les prisons
de Gwendoline, de Marie-Mathelle et de Gérôme
qui seront sur la bouche de Jésus.

Pour vous trois comme pour nous tous,
ce jour est un jour de libération.
Le péché nous lie.
La mort nous tient captifs
mais Jésus ressuscité est là au milieu de nous.
Son amour vient s’infiltrer dans toutes les fibres de notre être
jusque dans nos petits et nos grands tombeaux intérieurs
avec tout leur stock de tristesses, de hontes, de refoulements.

Et la Vie vient dans nos morts.
La Résurrection nous saisit.
Jésus nous saisit.
Et en Lui, nous devenons des vivants,
des hommes et des femmes toujours pauvres
mais rayonnants de vie et de joie.

*

Frères et sœurs, voilà bien la manifestation
de la miséricorde de Jésus :
IL Se penche sur nous tous
pour nous donner la santé éternelle
de l’esprit de l’âme et du corps,
et pour nous introduire dans une amitié
qui ne connaît pas de limite, celle-là même
que nous goûtons déjà dans la communion eucharistique.

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