FMJ MtlMercredi, 11e Semaine du Temps ordinaire – A
Frère Antoine-Emmanuel
2 R 2, 1.6-14 ; Ps 30 ; Mt 6, 1-6.16-18
18 juin 2014
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Que ma fin de vie soit féconde !

En ce temps où l’on parle beaucoup de fin de vie,
il est bon de regarder la « fin de vie » du prophète Élie
comme la liturgie nous le propose aujourd’hui.

Une chose est claire :
la fin de vie d’Élie est un débordement de grâce.

Pour lui-même bien sûr,
puisque sa vie toute consumée pour le Seigneur et pour son peuple est glorifiée, entraînée dans la gloire divine par un char de feu.

Mais elle est aussi un débordement de grâce pour Élisée,
et à travers Élisée, pour le peuple d’Israël
qui bénéficiera de son ministère.
De fait, Élisée reçoit double part de l’Esprit d’Élie
comme il l’avait demandé.
Et cela s’est passé
parce qu’Élisée a tenu à accompagner Élie
jusqu’à sa fin de vie.

Une fin de vie peut être très féconde.
C’est vrai de la fin de vie d’Élie.

C’est vrai de la fin de vie de Moïse
parce que son témoignage d’obéissance dans la mort
est aujourd’hui encore source de sagesse pour nous.
Moïse meurt dans l’obéissance à Dieu.
Moïse meurt happé dans un baiser de Dieu.

C’est vrai de la mort des prophètes
qui ont témoigné jusqu’à en mourir
dans la fidélité au Dieu d’Israël.

C’est plus vrai encore des témoins du Christ,
des apôtres, des martyrs,
de tous ceux et celles qui ont fait de leur mort un témoignage.
Tant et tant d’hommes et de femmes,
chrétiens ou non,
ont eu une fin de vie admirable…
Nous connaissons certainement tel parent, tel ami
qui est entré dans la mort avec un courage exemplaire,
un abandon, une joie…

Allons plus loin :
notre fin de vie peut-être – est appelée à être –
le moment le plus fécond de notre vie.
N’est-ce pas cela la grâce suprême
que nous pouvons demander à Jésus :
qu’Il rende notre mort extrêmement féconde.

Le Père François Xavier Durrwell
qui a tant médité le mystère pascal
voyait sa mort à venir comme son suprême apostolat.

Est-ce possible ?
Oui si nous apprenons dès maintenant
à communier à la mort de Jésus.
Parce que dans le fond,
la seule mort féconde est celle de Jésus.
Et ma mort ne sera féconde que dans la mesure
où elle est une communion au mourir de Jésus.

Une chose est sûre : c’est là le désir de Dieu.
Le Seigneur veut rendre notre mort féconde.
Comme Il veut rendre féconde notre vie éternelle !
C’est cela que le diable refuse et qu’il combat,
notamment à l’heure de la mort.
Mais c’est le dessein de Dieu…

Et comment notre éternité pourra-t-elle être très féconde ?
C’est notre être, c’est notre vie ici-bas,
qui sera glorifié là-haut :
si notre vie ici-bas est dense d’amour,
elle réfléchira largement, amplement,
la joie de Dieu.
Si notre vie ici-bas est dense de repentir,
d’humilité, de pauvreté de cœur,
elle réfléchira amplement la tendresse de Dieu.
Si notre vie ici-bas sert la paix,
a soif de justice,
pleure le péché du monde
et annonce l’Évangile au prix de la persécution,
elle réfléchira – et combien ! – la victoire de Dieu.

La mort n’est pas la fin de notre fécondité.
Elle est appelée à en être l’épanouissement !
Mais – et c’est l’Évangile de ce jour –
à une condition :
que nous changions de banque!

Si nous agissons pour accumuler un beau trésor
de réputation et de gloire humaine…
il n’y aura rien dans notre trésor du Ciel.
Il faut passer à une autre banque,
à une autre forme d’investissement.

Lorsque tu as donné de ton argent
ou de ton temps pour les pauvres,
sans le faire voir à personne :
tu as préparé une belle fécondité pour ton Ciel.

Lorsque tu as pris un moment de prière
pour une personne qui te fait souffrir
sans que personne ne le sache,
tu as préparé une belle fécondité pour ton Ciel.

Lorsque tu as jeûné pour la paix en Syrie
ou pour une autre urgence de notre temps
sans le dire à personne,
tu as préparé une belle fécondité au Ciel.

De fait, pourquoi investissons-nous autant
dans notre réputation
au point d’en perdre notre liberté et notre joie ?
Le seul investissement qui veuille la peine,
c’est : le Père voit dans le secret,
et Il te le revaudra. (Mt 6,4)
Littéralement « vous aurez un salaire
auprès de votre Père qui est aux Cieux ».
Et quel sera ce salaire ?
Ce sera de déborder de joie éternellement
pour le bonheur des autres.

Oui, frères et sœurs,
Ne nous réjouissons pas de nos œuvres pastorales.
Ne nous réjouissons pas de nos réussites apostoliques :
réjouissons-nous de ce que nos noms sont inscrits dans les Cieux
et de ce que nous passerons notre Ciel
à faire du bien sur la Terre et dans le Ciel !

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