FMJ MtlVendredi, 3e Semaine de Carême – B
Frère Thomas
Os 14, 2-10 ; Ps 80 ; Mc 12, 28-34
13 mars 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

En Jésus, aimer Dieu et aimer le prochain ne font qu’un

Je me souviens, lors d’une rencontre
entre juifs et chrétiens,
que nous parlions de ce double commandement
de l’amour de Dieu et du prochain,
mis en valeur par Jésus.
Un des participants juifs de cette rencontre
nous faisait remarquer
– avec une note humoristique –
que Jésus, en mettant ensemble
ces deux commandements,
avait fait un « copier-coller ».

En effet, ce sont là
deux commandements de la Torah juive,
qui se trouvent chacun à une place différente.
Le commandement de l’amour de Dieu
se trouve dans le Chapitre 6 du Deutéronome.
Il suit l’exposé des dix commandements
et il précède l’appel à la fidélité à Dieu
ainsi que la prise de conscience
de l’élection divine sur le peuple d’Israël.
Ainsi le commandement de l’amour de Dieu
est motivé par tout ce que Dieu a fait pour son peuple.
Autrement dit :
« Dieu n’a cessé de te montrer son amour…
alors toi aussi, à ton tour, aime-Le, de tout ton être. »

Le commandement de l’amour du prochain, lui,
se trouve au Chapitre 19 du Lévitique.
Il se trouve inséré dans une série
de prescriptions de justice et de morale qui vont loin.
Le verset 18 du chapitre 19,
dans son intégralité dit :
« Tu ne te vengeras pas
et tu ne garderas pas de rancune
envers les enfants de ton peuple.
Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
Je suis YHWH. »
Ainsi le commandement de l’amour du prochain
s’inscrit dans la justice entre les humains.

Si Jésus met ces deux commandements ensemble,
s’Il fait un « copier-coller »,
c’est que pour Lui, ils sont intimement liés.
Et plus que cela :
Pour Lui l’amour de Dieu est premier
et l’amour du prochain second.

D’aucuns aujourd’hui
ne verraient pas de rapport entre les deux.
L’amour de Dieu – pensent-ils – c’est la piété.
Et l’amour du prochain, c’est la justice,
les bonnes relations entre les humains.
Et nous voyons des personnes
qui font preuve de piété
et qui par ailleurs commettent des injustices flagrantes :
les djihadistes de l’État islamique
en sont aujourd’hui un exemple criant.
Nous voyons d’autre part des personnes
qui se disent a-religieuses
et qui ont le soucis de leurs semblables.

Cependant ces deux commandements,
même s’ils se trouvent à des places différentes,
font partie de la même Torah ;
du premier Testament
que Dieu a donné à son peuple Israël.

À la base de ce Testament,
il n’y a pas d’abord un code de préceptes
que Dieu aurait dicté à son peuple,
mais il y a l’expérience
que le peuple d’Israël a faite de Dieu.
C’est d’abord l’expérience
d’un Dieu plein de sollicitude,
qui agit dans leur Histoire,
qui ne cesse de les combler de bénédictions
depuis l’appel d’Abraham.

Et il y a surtout l’expérience
que le peuple d’Israël a faite
d’avoir été libéré par Dieu
de l’esclavage de l’Égypte
sous la conduite de Moïse.

C’est d’abord cela
qui est rappelé dans toute la Torah,
c’est-à-dire les cinq premiers livres de la Bible :
la Genèse, l’Exode, le Lévitique,
les Nombres et le Deutéronome.

Si donc j’ai conscience que Dieu m’aime,
qu’Il prend soin de moi,
alors je voudrai L’aimer à mon tour
et j’aurai soin d’aimer mes semblables humains,
avec qui je partage l’existence sur cette terre.

Dans le commandement
« aime ton prochain comme toi-même »,
il y a aussi le « comme toi-même »
qui peut poser question.

Est-ce que véritablement je m’aime moi-même ?
Est-ce que j’ai conscience
de ce qui véritablement est bon pour moi
et est-ce que je le recherche ?

En cela Jésus est notre modèle,
car Il S’est véritablement aimé Lui-même.
Même en vivant sa Passion,
c’est le grand projet de sa vie qu’Il a vécu,
tout passionné qu’Il était des humains
et de la volonté du Père de les sauver.

Jésus est le mieux placé pour mettre ensemble
les commandements de l’amour de Dieu
et de l’amour du prochain,
car Il est Celui qui les a le mieux vécus.
En Jésus, nous pouvons dire
que ce ne sont plus tant des commandements
que des expériences de vie.
En Jésus, nous voyons l’amour miséricordieux de Dieu
pour tous les humains
(pas seulement pour le peuple d’Israël).
En Jésus, nous voyons un homme
qui aime Dieu de tout son être.
En Jésus, nous voyons un homme
qui S’aime véritablement Lui-même.
En Jésus, nous voyons un homme
qui aime son prochain,
qui aime toute personne… passionnément.

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