FMJ Mtl25e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – A
Frère Thomas
Is 55, 6-9; Ps 144 (145) ; Ph 1, 20-24; 27; Mt 20, 1-16
24 septembre 2017
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Justice de calcul et justice de miséricorde

À la première heure le maitre embauche des ouvriers pour la journée
et il convient avec eux du salaire. Il établit un contrat avec eux.
À neuf heures du matin il embauche d’autres ouvriers en leur disant simplement :
« Je vous donnerai ce qui est juste. »
À cinq heures de l’après-midi il en embauche encore d’autres en leur disant simplement :
« Allez à ma vigne vous aussi. »
À la fin de la journée, nous voyons que ce maitre n’est pas préoccupé de comptabilité.
Il ne va pas payer ses ouvriers en proportion du nombre d’heures qu’ils ont fait.
Il va tous les payer du même salaire, un denier,
celui qu’il avait convenu avec les ouvriers de la première heure.
En fait un denier, c’est le salaire pour une journée.
Le maitre va ainsi faire comme si tous les ouvriers qu’il a embauchés
avaient travaillé durant toute la journée.
Plus que cela : le maitre va commencer par payer les derniers venus un denier
et va terminer par les premiers venus.

Les premiers venus récriminent, ils trouvent cela injuste.
Et nous les comprenons :
le salaire devrait être proportionnel au nombre d’heures de travail.

Mais le maitre invoque le contrat passé avec les premiers embauchés :
« N’as-tu pas été d’accord avec moi pour un denier? »
Puis il invoque son droit à faire ce qu’il veut de son bien.
Et il ajoute : « Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon? »
Voilà donc le cœur de la parabole.
Jésus veut nous faire passer d’une justice comptable à une justice de bonté.
C’est la justice de Dieu,
qui se plait à traiter les derniers venus comme les premiers venus
et qui va même jusqu’à les payer avant les autres.

« Le royaume des cieux est comparable au maitre d’un domaine
qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne. »
Il est sorti afin d’embaucher des ouvriers
et non afin de faire prospérer son entreprise.
Il pouvait se contenter d’embaucher quelques ouvriers à la première heure,
faire avec eux un contrat de travail en bonne et due forme
pour qu’ils fassent marcher son entreprise.
Mais non, le maitre embauche encore des ouvriers à 9h,
c’est-à-dire 3h après le début du travail,
d’autres à midi, d’autres à 3h de l’après-midi,
puis finalement il en embauche à 5h.
Le maitre n’est donc pas intéressé seulement par la bonne marche de son entreprise,
il est préoccupé par l’embauche de ses concitoyens.
D’ailleurs il dit à ceux qu’il trouve à la cinquième heure :
« Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire? »
Nous pouvons voir dans cette embauche
à toutes ces heures de la journée sur acte de miséricorde.

C’est Dieu qui appelle en tout temps, à toute heure.
Dieu est ainsi passionné par l’homme.
L’être humain peut ainsi se passionner de Dieu.
« Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver »
– dit le prophète Isaïe aujourd’hui – .
« Que le méchant abandonne son chemin
et l’homme perfide, ses pensées!
Qu’il revienne vers le Seigneur qui lui montrera sa miséricorde,
vers notre Dieu qui est riche en pardon. »

Il y a ceux et celles qui ont été embauchés à la première heure :
nous pouvons y voir ceux et celles qui ont été fidèles à la religion toute leur vie durant.
Il y a ceux et celles qui ont été embauchés à la 3è heure,
la 6è heure, la 9è heure et même la 11è heure :
nous pouvons y voir ceux et celles qui se sont convertis,
qui ont pris le train de l’Église en marche.
Le Seigneur va tous les traiter de la même manière.
«Ses pensées ne sont pas nos pensées,
ses chemins ne sont pas nos chemins. »

Nous penserions bien volontiers que le Seigneur
nous doit quelque chose pour notre service.
Pour lui, le servir est déjà une grâce.
Il va ainsi donner le même salaire à tous,
la même grâce à tous, à commencer par les derniers
car les derniers ont le plus besoin de sa sollicitude,
ils ont le plus besoin de sa miséricorde.

Il importe alors que les premiers venus entrent dans cette façon de voir du maitre
et se réjouissent de ce que les derniers venus soient traités de la même façon qu’eux.
Si pour les derniers venus la tentation c’est la désespérance de la miséricorde
de Dieu à leur égard, pour les premiers venus la tentation c’est la jalousie
par rapport aux derniers venus.
Nous retrouvons cela dans la parabole du fils prodigue et du père miséricordieux.

Sois béni Seigneur pour la justice qui n’est pas celle du calcul,
mais celle de la miséricorde que tu fais aux humains.
Lorsque nous sommes les derniers,
garde-nous de désespérer de la justice.
Et lorsque nous sommes les premiers,
garde-nous de regarder avec un œil mauvais ta justice.

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