FMJ Mtl4e DIMANCHE DE PÂQUES – A
Frère Antoine-Emmanuel
Ac 2, 14.36-41 ; Ps 22 ; 1 P 2, 20-25 ; Jn 10, 1-10
7 mai 2017
Magdala, France

Au Cœur de Dieu, au cœur des hommes

« Je suis la porte », nous dit aujourd’hui Jésus (Jn 10,7).
Et au verset qui suit l’Évangile de ce jour,
Jésus dira : « Je suis le Bon Berger » (Jn 10,11).

Quand Jésus prononce ces « Je suis »,
on ne peut pas ne pas penser au « Me voici »,
littéralement « Je suis » (Jn 18,5),
qu’Il prononce avec puissance au Jardin des Oliviers
lorsque les gardes disent qu’ils cherchent Jésus le Nazaréen.
« Quand Jésus leur eut dit : « C’est Moi, Je le suis »,
ils reculèrent et tombèrent à terre » (Jn 18,6),
tant ces mots étaient prononcés avec une puissance,
une autorité au-delà de toute mesure humaine.

De fait, quand Jésus dit : « Je suis »,
Il ne dit jamais quelque chose de secondaire,
de superficiel, d’éphémère.
Il livre son Être ; Il dit son Mystère.
Quand Il dit : « Je suis la lumière du monde » (Jn 8,12),
Il révèle son Être ;
il n’y a pas d’autre lumière que Lui ici-bas.
Quand Il dit : « Je suis la Vérité »,
c’est qu’Il est toute la vérité.
Quand Il dit : « Je suis le chemin »,
c’est que personne ne va au Père sinon par Lui.
Quand Il dit : « Je suis la Vie » (Jn 14,6),
c’est qu’en Lui est la Vie !
Pas parce qu’Il ferait ou serait mieux que les autres,
mais parce qu’Il est Dieu.

De même, quand Jésus dit : « Je suis le Bon Pasteur » (Jn 10,11),
ce n’est pas pour nous dire qu’Il est meilleur pasteur qu’un autre,
mais bien qu’Il est LE Pasteur,
le grand Pasteur des brebis,
comme le dira la Lettre aux Hébreux (Hé 13,20).
Il y a dans ces paroles une autorité formidable.
Le Pasteur de l’humanité entière… c’est Lui !

C’est ce que l’apôtre Pierre a proclamé tout à l’heure :
Il est le pasteur et gardien de nos âmes (cf. 1 Pi 2,25).
Il est Celui à qui nous pouvons confier notre âme ;
à qui nous pouvons confier jusqu’au plus intime
et au plus profond de notre être,
sûrs d’être compris, aimés et guidés.
Il est le « Gardien » qui veille sur nous avec soin.
Il est le « Pasteur » qui nous guide et nous nourrit,
qui jamais ne nous oublie…

Pensez à l’Évangile de dimanche dernier :
nous avons vu le Bon Pasteur partir à la recherche
de deux brebis complètement perdues.
Perdues dans leur désespérance, leur amertume,
leur cœur tristement froid.
Deux brebis qui ont quitté la communauté
et qui ont pris le chemin d’Emmaüs.
Qu’a fait le Berger ressuscité ?
Il S’est fait proche ; Il a marché avec eux.
Il a réchauffé leur cœur par sa parole ;
Il S’est laissé inviter par eux,
et Il S’est révélé à la fraction du pain.

Jésus n’a donc pas cessé d’être le Bon Pasteur
lorsqu’Il est mort sur la croix.
Mieux : Jésus n’a jamais été aussi pasteur
que lorsqu’Il était lié sur la croix.
Il est mort sur la croix pour venir nous chercher.
Il a connu l’abandon de Dieu le Père
pour ne pas nous abandonner à la mort.
« Le Bon Pasteur donne sa vie pour ses brebis » (Jn 10,11).

Oui, il y a quelqu’Un qui nous aime tendrement et follement
et qui n’a rien épargné pour ne pas nous perdre ;
pour nous chercher aussi perdus que nous puissions être.
Quelqu’Un qui jamais ne Se lassera de nous chercher
aussi profonds que soient les ravins où notre sensualité,
nos égoïsmes et nos peurs nous ont entraînés.

Tu tombes, tu retombes et Il te cherche et te re-cherche,
jusqu’à ce qu’Il t’ait retrouvé !
C’est pour cela que nous chantons avec fierté :
« Le Seigneur est mon berger ! » (Ps 22)
J’ai un berger… je ne suis ni perdu ni délaissé.
Et mon berger, c’est le Fils de Dieu !

*

Mais Jésus n’est pas le seul à vouloir nous guider
et Il le dit Lui-même dans l’Évangile de ce jour :
il y en a d’autres qui se présentent comme bergers
et qui sont même prêts à escalader les murs de notre conscience
pour – disent-ils – prendre soin de nous.

Qu’est-ce qui différencie Jésus de ces brigands ?
Les brigands entrent en nous par effraction.
Ils entrent ou bien par des promesses illusoires
ou bien par la peur.
Alors que Jésus entre en nous
par la porte de la vérité et de l’amour,
sans jamais nous séduire par des richesses
ni nous approprier par la peur.

L’histoire est remplie – et sera de plus en plus remplie –
d’hommes et de femmes qui prétendent nous sauver.
L’histoire est remplie de tyrans et de faux prophètes
qui ont envouté le monde par leurs promesses messianiques,
et ce n’est pas prêt de s’arrêter.
Plus le désordre moral gagne la société,
plus elle engendre des hommes et des femmes
qui se prennent pour les bienfaiteurs de l’humanité.

Et plus des bâtisseurs de murs obtiendront le pouvoir,
plus nous aurons à choisir entre eux et Jésus,
au prix de notre vie.
Plus des apôtres de la toute-puissance sur la vie
obtiendront du pouvoir,
plus nous aurons à choisir entre eux et Jésus,
au risque de notre vie.

Jésus, Lui, ne bâtit pas de murs.
Moi, dit-Il : « Je suis la porte ».
C’est merveilleux : Jésus ne dit pas
« J’ouvre la porte qui était fermée ».
Il dit : « Je suis la porte ».
Là où il n’y a pas de porte,
Jésus crée une porte, ouvre une porte,
et cette porte, c’est Lui !

Le séjour des morts n’avait aucune porte de sortie,
aucune issue vers le Paradis.
Jésus y est descendu et Il est désormais la porte
par laquelle les justes entrent au Paradis.

Et partout où le péché nous enferme,
partout où règne l’injustice,
face à tous les murs de nos sociétés et de nos cœurs,
Jésus est toujours la porte
qui nous ouvre à la liberté et à la joie.

« Si quelqu’un entre en passant par Moi,
il sera sauvé » nous dit Jésus (Jn 10,9).
« Il pourra entrer ;
il pourra sortir et trouver un pâturage » (Jn 10,9).
Dès lors, si nous vivons de Jésus,
les murs de la peur tombent.
Les murs de la honte tombent.
Les murs de la haine tombent.
Et nous devenons capables de passer continuellement
du Cœur de Dieu au cœur des hommes.

La génération tortueuse dont parle Pierre (Ac 2,40),
La mondanité spirituelle dont parle son successeur François
cloisonne, légalise, enferme, juge, accuse, condamne.
Jésus, Lui, ouvre les portes.
Là où je suis coincé et paralysé par mon péché,
Jésus entre, comme au soir de Pâques,
et m’ouvre un chemin de Vie.
La Pierre rejetée par les bâtisseurs de temples et de loi
est devenue la Pierre d’angle…

Quelle merveille, frères et sœurs.
Jésus est la Porte pour nous aujourd’hui.
Il y a entre nous toutes sortes de murs.
Jésus n’ouvre que des portes.
Jésus est entre nous la porte de l’Amour
qui nous fait entrer en communion les uns avec les autres.

Il est aussi la porte en nous puisqu’Il ouvre le mur
qui séparait l’amour et la souffrance.
Il a envahi la souffrance avec son amour
et porté l’amour jusqu’au don total – et souffrant – de soi.
Au point que Pierre nous dit aujourd’hui
que Jésus a laissé dans la souffrance ses propres traces
pour que nous trouvions à même nos souffrances
le chemin de l’amour.
Ce qui libère de la souffrance,
ce n’est pas la mort du fœtus, du malade ou du vieillard
comme le proclament les faux prophètes,
c’est Jésus qui ouvre la porte de l’amour.

*

Frères et sœurs, quelle lumière extraordinaire
dans ces pages de l’Écriture que l’Église nous donne aujourd’hui.
C’est une parole brûlante qui nous invite à veiller,
à garder le cœur en Jésus,
à ne céder ni aux puissants qui bâtissent des murs,
y compris au nom de Dieu,
ni aux faux prophètes qui s’assoient sur le trône de Dieu.
Gardons une profonde liberté intérieure.
Gardons précieusement et grandissons dans la fidélité à Jésus,
unique Rédempteur de l’homme.
Ayons ensemble le souci des âmes,
le souci de la communion, le souci de la paix.

Parce que Jésus est la Porte,
entrons sans cesse dans le Cœur de Dieu
pour y puiser l’Amour et la Vérité,
et sortons vers la ville pour y déverser l’amour
et y proclamer la vérité.
Quelle magnifique vocation que celle d’être chrétiens aujourd’hui.

© FMJ – Tous droits réservés.