FMJ MtlDIMANCHE DE LA DIVINE MISÉRICORDE – B
Frère Antoine-Emmanuel
Ac 4, 32-35 ; Ps 117 ; 1 Jn 5, 1-6 ; Jn 20, 19-31
19 avril 2009
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Paix à vous

Comment Marie-Madeleine a-t-elle reconnu Jésus ?
Elle l’a reconnu quand il a prononcé son nom :
Marie ! (Jn 20,16)
Comment les deux compagnons désabusés
en route vers Emmaüs
L’ont-ils reconnu ?
À la fraction du pain (Lc 24, 35).

Mais aujourd’hui c’est d’une manière différente
que Jésus Se fait reconnaître aux apôtres.
D’une manière très surprenante :
Jésus leur montre ses blessures,
et inséparablement Il leur dit :
« Paix à vous ! » (Jn 20, 19)

Montrer ses blessures…
Certains montrent leurs blessures
pour attirer sur eux la compassion des autres.
D’autres montrent leurs blessures
pour réclamer justice, voire pour crier vengeance.

Jésus aujourd’hui introduit dans le monde
une manière toute nouvelle de montrer ses blessures.
Il les montre non seulement pour Se faire reconnaître,
mais pour déployer sa miséricorde.

Nous le savons, Jésus en sa résurrection
n’est pas revenu à cette vie présente comme Lazare.
Jésus est entré avec son humanité
dans la plénitude de la Vie divine,
dans l’échange infini d’Amour de la Trinité.
Et ses blessures demeurent,
car ce sont des blessures d’amour
et l’amour ne passera jamais.

Benoît XVI exprime cela de manière magnifique :

Le Seigneur a apporté avec Lui ses blessures dans l’éternité.
C’est un Dieu blessé ;
Il S’est laissé blesser par l’amour pour nous.
Les blessures sont pour nous le signe qu’Il nous comprend
et qu’Il Se laisse blesser par l’amour pour nous.
Comme nous pouvons nous aussi toucher ses blessures
dans l’histoire de notre temps !
En effet, Il se laisse toujours blesser à nouveau pour nous.
Quelle certitude de sa miséricorde et quel réconfort
celles-ci signifient pour nous!
Et quelle certitude nous donnent-elles sur ce qu’Il est :
« Mon Seigneur et mon Dieu! ».
Et combien elles constituent pour nous
un devoir de nous laisser blesser à notre tour pour Lui !
(Homélie 2e Dimanche de Pâques, 15 / 04/ 2007)

Frères et sœurs, voilà bien
ce que le Psaume nous a fait chanter :
Éternel est son amour…
La Miséricorde divine embrasse
toutes les saisons de notre vie,
et elle embrasse toutes les générations.

*

Nous ne savons que trop que l’Occident
pourtant ensemencé d’Évangile depuis 20 siècles
connaît aujourd’hui une nuit morale et spirituelle.
Pourquoi le Seigneur permet cela ?
N’est-ce pas pour que nos yeux
finissent par s’ouvrir
sur l’étendue de la Miséricorde ?
L’Occident depuis Constantin
n’a-t-il pas trop souvent
ramené Dieu et l’Évangile
à sa propre mesure humaine ?
N’avons-nous pas façonné
notre propre mode de justification
par nos œuvres chrétiennes ?

Or le Seigneur veut nous faire connaître sa miséricorde.
Il veut nous y plonger
parce que rien d’autre que la Miséricorde
peut arrêter la course du mal.

Le Saint-Père Jean-Paul II voulut que ce dimanche
soit célébré comme la Fête de la Divine Miséricorde :
dans la parole « miséricorde », il trouvait résumé
et à nouveau interprété pour notre époque
tout le mystère de la Rédemption.
Il vécut sous deux régimes dictatoriaux,
et, au contact de la pauvreté, de la nécessité et de la violence,
il ressentit profondément la puissance des ténèbres,
qui menace le monde également à notre époque.
Mais il fit également l’expérience, avec tout autant de force,
de la Présence de Dieu qui s’oppose à toutes ces forces
à travers son pouvoir totalement différent et divin :
avec le pouvoir de la Miséricorde.
C’est la miséricorde qui met une limite au mal. (idem.)

*

Alors, en cette fête de la Divine Miséricorde,
le Seigneur nous redit ce qu’Il disait à Thomas :
« Porte ta main et entre dans mon côté » (Jn 20,27) .
Entre dans ma blessure,
pénètre dans ma plaie ouverte.
C’est là que jaillit la Miséricorde pour le monde entier !
C’est là que se trouve la Paix !

Dans le journal de Sœur Faustine
se trouve cette parole de Jésus :
« L’humanité ne connaîtra pas la paix
tant qu’elle ne se tournera pas
vers la source de ma Miséricorde ».

La Paix…
Trois fois dans l’Évangile de ce dimanche
nous entendons Jésus nous dire :
« Paix à vous ! »

Au nom de Jésus je vous le dis aujourd’hui :
Paix à vous !
Pas de grands discours, rien que ces mots :
Paix à vous !
« Jésus ressuscité Se montre soudain
au milieu de ses disciples,
écrit un moine de l’Église d’Orient.
Il ne S’attarde pas à de longs reproches
sur l’infidélité et l’incrédulité des siens.
Et eux ne s’attardent pas
à de longues excuses ou explications.
Et il poursuit :
Quand j’ai trahi et abandonné Jésus.
il n’est pas nécessaire qu’anxieusement,
je recherche et prépare
les conditions de ma rencontre repentante avec le Maître.
L’attitude extérieure sera simple et facile.
Elle doit cependant s’accompagner
d’un prosternement intérieur. »

Oui, frères et sœurs,
la réconciliation n’est pas bavarde.
Pour ne pas risquer de se diluer dans les mots.

Paix à vous !

Jésus aime renouveler pour nous
ce qui se produisit pour la femme adultère.
Sa présence chasse les scribes et les pharisiens
qui sont en nous,
et nous nous retrouvons en face de Lui.
Simplement.
Silencieusement.
En face du Christ de Pâques qui est
l’incarnation définitive de la Miséricorde
(Jean-Paul II. La Miséricorde divine, n° 2)

Paix à vous !

Qu’aucune âme ne craigne de s’approcher de Moi,
même si ses péchés sont rouges comme l’écarlate :
cette fête est sortie du plus profond de ma miséricorde,
elle est une affirmation réitérée
de mon immense compassion envers les âmes.
Je désire que le premier dimanche après Pâques
soit une fête solennelle. (des écrits de Sr Faustine)

*

La Miséricorde déborde pour nous aujourd’hui ;
elle déborde pour nous et elle nous envoie :
« Comme le Père M’a envoyé,
Moi aussi Je vous envoie (Jn 19,21) »

« Comme le Père M’a envoyé… »
C’est dire que Jésus nous envoie
mourir d’amour pour nos frères ;
Il nous envoie mourir d’amour
pour révéler la Miséricorde divine.
Mourir d’amour et ressusciter
dans une immense communion
nous unissant en éclats de joie
avec tous ceux qui auront accueilli le Pardon.

Nous voici appelés à incarner la Miséricorde ;
à renoncer à condamner qui que ce soit
pour, au contraire, embrasser le monde
avec la Miséricorde divine.

C’est cela la mission de l’Église :
embrasser le monde avec la Miséricorde de Dieu.
Cela comporte de dénoncer et condamner le péché.
Cela peut comporter d’exhorter et corriger les pécheurs,
mais toujours dans le but de révéler et transmettre
la grande absolution du monde
que le Père a prononcée
par les mains transpercées de son Fils.

Aussi pouvons-nous nous interroger ce matin :
ma présence de chrétien dans le monde,
notre présence à tous,
est-elle une présence de miséricorde ?
Ma vie annonce-t-elle la miséricorde de Dieu ?

*

Pour qu’il en soit ainsi,
pour que notre vie proclame la miséricorde,
Jésus ressuscité, en ce jour béni, souffle sur nous,
ravivant en nous tous la Présence de l’Esprit Saint
qui est en personne la puissance divine de la miséricorde.

Jésus souffle sur nous.
C’est un vent de fraîcheur
– la fraîcheur de la Résurrection –
qui chasse les nuages noirs
de la tristesse et de la culpabilité
pour nous rendre au soleil de la Miséricorde du Père.

C’est un vent puissant qui effectue en nous, peu à peu,
un merveilleux travail d’érosion éolienne
pour qu’apparaissent en nous les sentiments mêmes de Dieu.

Voilà ce qui se déploie en cette Eucharistie
du deuxième Dimanche de Pâques !

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